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Main dans la main (jusqu’au 27 juin)

le  24/04/2023   au théâtre du Marais, 37 rue Volta 75003 Paris (lundi et mardi à 19h30)

Mise en scène de Alexandre Oppecini avec Fabien Ara et Nathanaël Maïni écrit par Alexandre Oppecini




Paul et Manu, deux hommes, un jeudi, tard dans la nuit. Après une recherche frénétique sur les applications de rencontres, Paul tombe sur le profil de Manu. Lui, l’adepte des coups d’un soir, a besoin de sexe. Personne d’autre à se mettre sous la dent ? Manu est localisé à 535 mètres. Paul le fait venir. La rencontre ne fonctionne pas : Paul, parisien de fraiche date et fêtard invétéré, n’attend que du sexe mais Manu, ex-hétéro converti récemment aux relations entre hommes, lui oppose sa timidité et sa retenue. « Ne me remercie pas, dit Paul avec mépris, tu es ma seule option ».
Peu à peu, Manu va entrer dans la vie de Paul. Ce qui donne lieu à des scènes de la part de Paul, qui est pour le moins démonstratif. Ainsi, après une invitation à diner de la part de Manu : « un diner, c’est trop pour moi, à la limite une partouze ; toi, tu n’y vois qu’une pizza, mais si nous mangeons une pizza, c’est la mort de toi et moi » ! Leur relation sera aussi houleuse que peut l’être celle d’un corse un peu taciturne pas encore à l’aise dans sa sexualité (Manu) et d’un adepte des fêtes et du sexe débridé, peu soucieux du lendemain (Paul). Quelques scènes drôles émaillent de cette évolution des relations. Manu s’ouvre peu à peu et tente de présenter Paul à sa famille corse, peu ouverte aux amours masculines. Le flop sera total.
Alors qu’il souhaite banaliser le propos, l’auteur a choisi de faire de Paul un personnage caricatural, « une folle » comme il se qualifie lui-même. Pourquoi pas ? Mais ce choix fige le comédien qui l’incarne (Fabien Ara) dans une unique posture tout au long de l’intrigue. Là où Manu évolue, lâchant bientôt ses défenses et se laissant envahir par les sentiments, Paul reste hautain, méchamment snob. C’est Nathanaël Maïni qui incarne Manu avec finesse et l’on découvre là un comédien. Est-ce parce que son personnage est plus sympathique qu’il retient plus l’attention ou est-ce simplement parce que la palette des sentiments qu’on lui donne l’occasion de jouer est plus large ? On laisse ici la question ouverte à l’intention des futurs spectateurs. Prévenons-les cependant tout de suite, ces fameux spectateurs ! Si avec « Main dans la main », l’auteur, Alexandre Oppecini, dit nous proposer une histoire universelle, il n’en est hélas rien. Tout, dans les codes, le vocabulaire, les propos à connotation fortement sexuelle, cantonne les propos à une relation homosexuelle masculine, ce qui est bien dommage. Mais c’est un choix. Et si la dénonciation des agressions homophobes est chose indispensable, était-il besoin ici d’en faire quasiment la conclusion, quitte à plaquer une situation (Manu se fait agresser par un groupe ouvertement « anti-gay ») à peine évoquée dans le reste de la pièce ? On sort de (« main dans) la (main ») fort sceptique, en se disant une fois de plus qu’une belle cause ne fait hélas pas forcément un bon spectacle.

Eric Dotter



 
 
 
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