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Juste la fin du monde (jusqu'au 30 juin)

le  18/05/2018   au Studio Hébertot, 78bis boulevard des Batignolles 75017 Paris (du jeudi au samedi à 21h)

Mise en scène de Jean-Charles Mouveaux avec Vanessa Cailhol, Philippe Calvario, Jil Caplan, Esther Ebbo, Jean-Charles Nouveaux et Chantal Trichet écrit par Jean-Luc Lagarce




En fils prodigue, Louis vient visiter sa famille. Peut-être pour annoncer qu’il ne lui reste plus longtemps à vivre. « A 34 ans, j’allais mourir…, il fallait annoncer, dire ma mort prochaine » !
Ce devrait être un moment de retrouvailles émouvant, poignant. Mais il n’en sera rien, au contraire : Louis restera enfermé dans sa superbe et l’accueil d’abord chaleureux voire enthousiaste (surtout de sa jeune sœur Suzanne) va tourner à la rancœur et aux règlements de compte.
Il est facile de reconnaitre dans « Juste la fin du monde » un récit autobiographique. Très réaliste, Jean-Luc Lagarce, son auteur, y annonce sa fin prochaine à 34 ans, emporté par le Sida. Le récit et la langue notamment sont eux vivants, voire très vivants. L’écriture avance, recule, les phrases sont répétées, comme pour en préciser le sens, les affiner toujours et encore. Le jeu de massacre est donc plus verbal que physique : même si tout le monde y va de sa diatribe contre Louis, le fils. Logorrhée chez Catherine la belle-sœur, fougue et passion chez Suzanne la sœur, reproches violents chez Antoine le jeune frère, chacun exprime comme il le peut sa gêne devant ce retour inattendu.
Même si presque tous les comédiens s’approprient avec talent cette langue, faite de peu de mots mais précise et intransigeante, on émettra une petite réserve sur Jil Kaplan, parfois maladroite et peu convaincante. A l’opposé, la jeune Vanesse Cailhol, qui incarne Suzanne, la sœur du héros, est époustouflante. En corps et verbe, elle donne chair à ce texte qu’elle semble inventer au fur et à mesure qu’elle le dit, et dans sa bouche, l’artificiel devient naturel.
On ne peut pas suggérer au spectateur avide de distraction de se ruer à cette pièce car il ne pourra s’identifier à aucun de ces personnages peu sympathiques, et encore moins au héros, le fils prodigue, quasiment muet mais qui encaisse avec flegme voire indifférence les critiques dont il est l’objet. Le spectateur curieux de révélation pourra en revanche découvrir ou redécouvrir une forme d’écriture théâtrale passionnante et une troupe de comédiens fort bien orchestrée.

E.D



 
 
 
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