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Aime comme Marquise

le  14/03/2022   au théâtre La Bruyère 5 rue La Bruyère 75009 Paris (dimanche à 16h et lundi à 20h)

Mise en scène de Chloé Froget avec Aurélie Noblesse, Xavier Girard, Christophe Charrier et Chloé Froget écrit par Philippe Froget




Fille du peuple devenue saltimbanque, elle n’en était pas moins « Marquise » sur scène. C’est ainsi que nous est présentée Thérèse de Gorla, la comédienne-phare de la troupe de Molière qui, séduite par la verve de la troupe, décida un jour d’épouser leur destin et de prendre ce curieux pseudonyme. Alors, comme ça, « elle voudrait ne pas manger à sa faim, recevoir des légumes variés et avariés ? », lui demande ainsi le comédien « gros René » avant de la présenter à Molière, le maître. Gros René alias René Berthelot dit du Parc, qui, une fois intégrée dans la troupe, en fera son épouse.
Dans ce récit en flashback, nous sommes des décennies plus tard, et c’est « Marquise », désormais tragédienne, que saisit au vol Mr de la Reynie, chef de la police sous Louis XIV venu l’interroger. Le but de son enquête ? Prouver que Molière n’est pas l’auteur de ses pièces car enfin « l’on peut se demander sans être inquisiteur où il trouve le temps pour être auteur », se questionne l’homme. « Marquise » apparait la mieux placée pour répondre aux questions de l’enquêteur, elle qui fréquenta de près Molière, de trop près sûrement au goût de Gros René, son mari.
Celle qui rencontra Corneille presque par hasard, qui croisa le roi ainsi que le fer avec la féroce Armande Béjart, l’épouse de Molière, moins jalouse des infidélités chroniques de son mari que du premier rôle que lui ravit la jeune comédienne. Marquise donc, désormais au service de Racine, se livre avec bonne grâce au policier venu l’interroger. Elle revient sur son histoire dans la fameuse troupe de Jean-Baptiste Poquelin. Et c’est sur l’avant-scène que nous la retrouvons jeune. Grâce à un double espace sur le plateau du théâtre la Bruyère, l’action se déroule dans le présent de la comédienne en pleine maturité‚ mais aussi dans son passé‚ sa prime jeunesse.
Autant la Marquise contemporaine du récit est tout en retenue, sûre de son charme et de son talent, autant la jeune « Marquise », encore dans la troupe de Molière, est extravertie, sorte de Madame Sans Gêne avant la date. Les deux hommes quant à eux, revêtent de nombreux rôles : souvent de La Reynie, tantôt Gros René, tantôt encore D’Artagnan, et parfois Louis XIV. Ils le font avec plus ou moins de bonheur mais c’est le risque de la multiplication des identités sur un même comédien.
D’une belle écriture mêlant prose et vers de plutôt bonne facture, « Aime comme Marquise s’inscrit dans la tradition des divertissements littéraires permettant au spectateur de s’instruire en se distrayant. La salle plutôt remplie, en ce lundi de deuxième représentation, semble y trouver son compte, souvent rassurée par des répliques connues. Le décor, ingénieux et changeant, qui projette le spectateur dans ce 17ème siècle littéraire mais aussi marqué par le pouvoir absolu, fonctionne lui aussi plutôt bien. Des deux « Marquise », chacun choisira sa préférée. On nous permettra d’opter pour la version plus juvénile incarnée avec énergie et fraîcheur par Chloé Froget, qui signe aussi la mise en scène.
Malgré tous les atouts dont nous faisons ici la liste, « Aime comme Marquise » peine à séduire. Est-ce dû au côté quelque peu suranné de l’écriture ? Au fait que les représentations n’avaient repris que la veille ? C’est là la fragilité et le mystère du spectacle vivant. Une chose est sûre : le spectateur amateur de divertissement littéraire y trouvera son compte.

E.D



 
 
 
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