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Miracle en Alabama

le  21/02/2018   au théâtre La Bruyère, 5 rue La Bruyère 75009 Paris (du mardi au samedi à 21h et matinée samedi à 15h)

Mise en scène de Pierre Val avec Valérie Alane, Julien Crampon, Stéphanie Hédin, Marie-Christine Robert, Pierre Val et Lilas Mekki ou Clara Brice écrit par William Gibson




Nous sommes en 1887, en Alabama dans une famille ordinaire. Chez les Keller, il y a le père, Capitaine Arthur, sa (seconde) femme Kate, son fils James et la sœur du capitaine, Tante Eve. Le portrait serait cependant incomplet si l’on omettait Hélène, la fille du couple, une jeune créature brutale et chapardeuse, que l’on calme comme un animal en lui donnant une friandise.
Pour le couple, Hélène est l’objet de toutes les attentions et de tous les conflits. Il faut dire qu’Hélène a eu le malheur de naître aveugle, sourde et muette. Enfin quasi sauvage, elle est emmurée dans le silence et ne « communique » qu’à grands renforts de gestes désordonnés. Alors, à défaut de la comprendre ou de savoir se faire comprendre d’elle, on vit dans le malheur et on la laisse prendre sa place, trop de place.
Dans ce huis-clos où est cette famille plutôt hors normes, les parents désespérés vont faire appel à Mademoiselle Annie Sullivan, gouvernante et ancienne aveugle qui croit en l’apprentissage et en l’obéissance, refusant de s’apitoyer : « de la pitié pour ce petit despote, je rêve » dit-elle, en parlant de la jeune fille. S’ensuivra un face à face, voire un corps à corps entre la préceptrice et son élève. Déterminée, Annie Sullivan veut enseigner à Hélène le moyen de communiquer : « Le langage compte plus pour l’esprit que la vue » dit-elle en substance. C’est qu’elle croit en son élève : « ce petit monstre meurt d’envie d’apprendre, et moi, je vais profiter de cette envie ».
Y Parviendra-t-elle ? Nous laisserons ce maigre suspens aux spectateurs qui iront voir la pièce. Mais si l’on précise que « Miracle en Alabama » s’inspire largement de la vie d’Hélène Keller, qui, née en 1880 aveugle et sourde, n’en obtiendra pas moins un diplôme universitaire, et deviendra une grande figure du militantisme socialiste, féministe et pacifiste aux USA, on donne une idée de l’issue de l’intrigue de ce très honnête spectacle. Bien que de facture classique, la mise en scène de Pierre Val donne à chacun des personnages l’occasion d’exprimer sa richesse, chaque comédien pouvant ainsi jouer sa partition dans une harmonie bien orchestrée. Plus qu’une illustration, les décors et le jeu choisissent de miser sur l’évocation. Le propos reste ainsi d’une parfaite actualité.
On retient bien entendu particulièrement les face à face entre Annie Sullivan (jouée par Stéphanie Hédin) et Hélène Keller son élève (incarnée en alternance par Lilas Mekki et Clara Brice). On est impressionné par l’intensité physique et dramatique qui se dégage d’échanges parfois violents entre la préceptrice, qui ne veut rien lâcher de sa croyance en une nouvelle pédagogie et sa jeune élève, dont les repères sont soudain bouleversés par l’arrivée de cette inconnue qui ne concède rien…Loin des affrontements entre deux figures masculines, trop souvent déclinés sur les plateaux, « Miracle en Alabama » donne la part belle aux femmes - à deux femmes particulièrement -, et c’est comme un air frais d’originalité qui balaye le plateau du théâtre La Bruyère.

E.D



 
 
 
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