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- expo : Chéri Samba, dans la collection Jean Pigozzi, au Musée Maillol (jusqu'au 7 avril 2024)

le  17/10/2023   au Musée Maillol, 61 Rue de Grenelle 75007 Paris

Mise en scène de Jérôme Neutres et Elisabeth Whitelaw, commissaires de l'expo avec des oeuvres d'art contemporain africain écrit par ou plutôt créé par Chéri Samba




Le musée Maillol présente, cet automne à Paris, une rétrospective de l’oeuvre du peintre Chéri Samba, couvrant quarante ans de création.

L’ensemble des 50 oeuvres réunies pour l’occasion proviennent de la collection Jean Pigozzi, l'une des plus importantes collections d’art contemporain africain au monde, qui a largement contribué depuis plus de trente ans à la reconnaissance des artistes d’Afrique sub-saharienne sur la scène internationale.

Sous le commissariat de Jérôme Neutres et Elisabeth Whitelaw, l’exposition présente un parcours à travers les thématiques majeures de l’oeuvre de Chéri Samba : l’autoportrait comme élément central de sa peinture, le Congo et l’Afrique, géopolitique et environnement, l’histoire de l’art et enfin la femme, thème avec lequel apparaît dans le musée un dialogue inédit avec l’oeuvre de Maillol.

Chéri Samba (né en 1956 dans le village de Kinto M’Vuila au Congo) est sans conteste le peintre africain le plus célèbre de sa génération. Figure essentielle du mouvement de la « peinture populaire » congolaise qui a émergé dans les années 1970, Chéri Samba découvre très tôt une vocation pour le dessin, quitte l’école à 16 ans et rejoint la bouillonnante capitale Kinshasa où il devient peintre d’enseignes publicitaires tout en publiant des bandes-dessinées.
Il ouvre son propre atelier en 1975, réalise tout d’abord des travaux de commande puis impose son style dans une peinture figurative et narrative très colorée où il se met en scène et incorpore des textes pour mieux faire passer ses messages : chroniques du quotidien, des moeurs, conflits sociaux, moraux et politiques. Samba interpelle, dénonce, caricature et provoque, le plus souvent avec humour, dans un style qui est tout sauf naïf.
Révélé en France en 1989 dans l’exposition culte Magiciens de la Terre, organisée par le Centre Pompidou, Chéri Samba a fait l’objet d’une première grande exposition monographique en 2004 à la Fondation Cartier, et a participé depuis à de très nombreuses expositions, telles que Beauté Congo (2015) ou Les Initiés à la Fondation Louis Vuitton (2017).

*Une exposition produite par Tempora et conçue en étroite collaboration avec la collection Jean Pigozzi et le Musée Maillol.

-Parcours de l'exposition :
Cette exposition au Musée Maillol est la première grande exposition monographique de l’œuvre du peintre couvrant quarante ans de création. Avec plus de 50 tableaux, des années 70 à nos jours, elle présente un parcours à travers cinq thématiques majeures de son œuvre.

*L'autoportrait comme usage du monde :
Afin d'esquiver les contestations éventuelles des individus pouvant se reconnaître dans ses tableaux, Chéri Samba « performeur-sapeur » dans l’âme et dans l’imagination, décide très tôt de recourir à l'autoportrait, qu’il décline dans un grand nombre d'œuvres, procédé qui lui permettra aussi d'augmenter sa notoriété. Tel un prédicateur qui tente de rivaliser avec les vedettes de la télévision, il interpelle son public en évoquant des sujets qui lui sont familiers afin de provoquer réflexion et questionnement le plus souvent avec humour. Il manie trois langues dans ses textes, le lingala, le kikongo et le français, afin de toujours signifier au spectateur et à sa clientèle étrangère qu'il reste fidèle à son public kinois, même s'il n'a plus accès à ses tableaux que l'artiste expédie désormais à l'étranger au fur et à mesure de sa production. Dans son œuvre la plus célèbre, J'aime la couleur, il représente son visage en forme de spirale sur fond de ciel bleu, un pinceau entre les dents, telle une arme pacifique de promotion massive. Comme souvent, il comprend un double sens : un hommage à la peinture, qui donne du sens à la vie, et une affirmation de l'homme de couleur. A cet égard, il s'amuse à nommer les Blancs, les « sans couleurs »..

*La femme multiple :
Mère, épouse, maîtresse, femme d'affaires ou prostituée, la femme kinoise moderne traverse la vie et l'œuvre de Samba. Actrices de scènes du quotidien à caractère moral ou provocateur, voire crues, le plus souvent traitées avec humour ou bien célébrées nues, pour illustrer de manière cocasse le célèbre « deuxième bureau ». Samba a également peint à ses débuts, comme beaucoup de ses contemporains, la célèbre icône d'Afrique de l'Ouest et Centrale, « Mami Wata », représentée sous les traits d'une sirène à peau blanche, dangereuse séductrice et objet de culte pour qui veut s'enrichir et s'emparer des attributs de la modernité. D'une manière générale, Samba ne se place pas dans un rapport intime ou amoureux avec la femme représentée, il y a toujours une distance et un adage à
l'origine de la composition. Ainsi les deux corps nus qui cernent l'artiste dans le tableau L'adorateur sont-ils un hommage à la Mère, par ailleurs célébrée dans Le lait maternel de manière plus allégorique et humoristique en pourvoyeuse de lait dont l'homme a bien du mal à se passer..

*Kinshasa, le Congo et l'Afrique :
Kinshasa, ville de tous les possibles, ville d'ambiance que tout Congolais qui se respecte doit avoir fréquenté au moins une fois dans sa vie, métropole tentaculaire et première ville francophone au monde est la patrie d'adoption de Chéri Samba qui y vit et y travaille depuis 50 ans. Si Samba célèbre bien la vie nocturne trépidante et joyeuse dans une scène de bar, la plupart des tableaux traitant de sujets congolais ou africains, dénoncent les travers et vicissitudes de la politique et du développement en Afrique et au Congo, tel l'Agriculteur sans cerveau, exploité et accablé, ou le Petit-Kadogo, hommage lumineux aux milliers d'enfants-soldats enrôlés par le président Laurent-Désiré Kabila. Les virus jumeaux, le Sida et Ebola sont quant à eux incarnés par deux têtes de monstres hérissées d'armes crachant leur feu sur un couple d'humains siamois, coiffés d'une tête commune.

*Géopolitique :
Chéri Samba, artiste mondial qui s'intéresse au monde et que l'actualité interpelle et inspire sans relâche, a progressivement élargi le champ de ses dénonciations et questionnements à des thématiques et évènements mondiaux : la traite négrière, à qui a-t-elle réellement profité ? L'arbitraire et le déchirement des frontières, le bouleversement
climatique, tandis que dans le tableau Le monde vomissant, la planète recrache les fusils et les mensonges de l'Amérique sur les armes de destructions massives lors de l'invasion de l'Irak. Les attentats du 11 septembre lui inspirent par ailleurs un magnifique tableau crépusculaire, tandis que l'artiste africain célèbre l'élection du président Barack Obama. Mais Samba transmet également des leçons de sagesse dans une composition méditative et allégorique dont le message est « Réfléchir avant d'agir ».

*Histoire de l’art revue et corrigée :
Chéri Samba, parce qu’il compte parmi les premiers artistes africains reconnus en Occident, intègre dans sa peinture une vision subjective et critique d’une histoire de l’art occidentale qu’il considère ethnocentrée et faussée. Dans Hommage aux anciens créateurs, Samba met en scène avec un certain militantisme le débat sur la légitimité des artistes classiques africains, méprisés ou ignorés en raison de l’absence de musées en Afrique, mais paradoxalement très présents dans les collections des musées occidentaux. Dans le triptyque Quel avenir pour notre art ?, l’artiste apparaît à égalité avec Picasso, qu'il représente en homme noir, et regrette son entrée tardive dans les musées occidentaux, en l'occurrence le centre Pompidou. Par ailleurs, si Samba est très fier de sa présence aujourd'hui dans de nombreuses collections privées et publiques, il reste très attaché à son appartenance au mouvement des peintres populaires de Kinshasa qu'il a longtemps présidé, et rend volontiers hommage à ses aînés, tel le peintre Moke avec lequel il s'est représenté dans un de ses anciens autoportraits, et cite souvent le critique d'art congolais Célestin Badibanga, pionnier de la critique d'art en RDC, qui l'a soutenu et encouragé sur la voie de cette figuration nouvelle et inventive qui s'est développée en marge de l'art académique enseigné à l'École des Beaux-arts de Kinshasa dans les années 80.



 
 
 
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