en 
 
 
cinema

 
 

Les jardins du roi (sur Canal + Grand Ecran)

Sortie  le  09/06/2023  

De Alan Rickman avec Kate Winslet, Matthias Schoenaerts, Alan Rickman, Stanley Tucci, Helen McCrory, Steven Waddington et Jennifer Ehle


Artiste aussi douée que volontaire, Sabine De Barra conçoit de merveilleux jardins. En 1682, son talent lui vaut d’être invitée à la cour de Louis XIV, où le célèbre paysagiste du roi, André Le Nôtre, fasciné par l’originalité et l’audace de la jeune femme, la choisit pour réaliser le bosquet des Rocailles. Ce sera une pièce maîtresse des jardins, la salle de bal à ciel ouvert du nouveau palais que le Roi Soleil souhaite créer à Versailles pour éblouir l’Europe.
Tout en donnant son maximum et en menant l’incroyable chantier pour terminer à temps, Sabine s’aperçoit vite qu’à la cour, le talent ne suffit pas : il faut aussi maîtriser l’étiquette et savoir naviguer dans les eaux troubles des intrigues. La jeune femme défie les barrières sociales et celles liées à son sexe ; elle noue même une surprenante relation avec le roi et gagne la confiance du frère du souverain, Philippe.
Au-delà des interdits et des passions, au coeur d’une cour sur laquelle le monde entier a les yeux rivés, Sabine et Le Nôtre vont tout donner pour porter le rêve de leur vie malgré les obstacles...


Après L’allée du roi, livre de Françoise Chandernagor adapté à la télévision par la réalisatrice Nina Companéez en 1995, c’est maintenant au tour des Jardins - toujours du même roi, le 14ème bien entendu ! - de faire leurs entrées au cinéma, 20 après le précédent. A la seule différence que cette fois, la mise en scène est faite par un acteur britannique et non des moindres, Alan Rickman – vous savez, le mémorable méchant face à Bruce Willis dans le célèbre Piège de cristal et, surtout, l’énigmatique professeur Rogue dans la fameuse saga Harry Potter ! – qui, pour ses deuxièmes pas derrière (après L’invitée de l’hiver en 1997) et devant la caméra (ici en Louis XIV, bien évidemment !), a su restaurer à merveille tout le charme, le clinquant et le faste d’une époque révolue (pensez donc, 1682 !) à l’écran, d’autant plus que ce comédien de renom, élevé aux productions classiques et ancien membre de la Royal Shakespeare Company, ne pouvait décemment pas manquer de faire resplendir toute la gloire de la France – bien que cette dernière ne soit pas son pays d’origine, il a su respecter l’image de la royauté dans toute sa splendeur, elle qui doit être un peu près la même que de l’autre côté de La Manche ! -, tout en possédant la maîtrise, ainsi que l’art et la façon d’accommoder au mieux ce genre de création prestigieuse à la sauce européenne pour changer et non américaine comme c’est souvent l’habitude ces temps-ci. La comparaison cinématographique entre ses 2 pays s’arrête là car, si elle est bien réelle, elle n’est pas forcément toujours synonyme de réussite !
Grand bien lui a pris car le résultat est d’une grande beauté visuelle, tels des tableaux vivants colorés et méticuleusement soignés, avec un souci du détail et de la reconstitution qui frise parfois l’obsession : on n’est d’ailleurs pas très loin de ceux magistralement exécutés par le réalisateur Peter Greenaway – Meurtre dans un jardin anglais ; Le cuisinier, le voleur, sa femme et son amant ; La ronde de nuit - mais dans un esprit narratif et un style posé très typé « victorien » plutôt différents. Toutefois, il manque un petit quelque chose qui aurait permis à cette fresque d’être incontournable, du moins formidable, causée par à la fois une atmosphère d’une lenteur exacerbée, des dialogues fortement teintés de théâtralité, des postures engoncées à l’extrême et des conventions aussi plombantes qu’ampoulées, des silences tout en retenue, des décors presque sans aucun jardin en vue ou alors si peu - sauf le tout dernier plan en images de synthèse (un comble tout de même pour un film au titre on ne peut moins équivoque sur le sujet abordé ici !) et, finalement, un récit intemporel sans véritable intrigue si ce n’est peut-être l’esquisse en accéléré d’une construction paysagiste mont(r)ée ici en toute humidité, pardon, humilité, et bien connue du public (le bosquet des Rocailles), ainsi qu’une aventure sentimentale autour d’une romance particulièrement exaltée, prévisible dès le début et cousue de fil blanc entre nos 2 artistes jardiniers.
Bref, l’ensemble reste figé dans une ambiance certes simple mais fausse d’un « bien-être » très pesant et enlisé dans un académisme stylisé d’un autre temps. En réalité, ce scénario, autour de la création des jardins du château de Versailles par André Le Nôtre, se limite à nous jouer quelques tours pendables à travers un esthétisme intense pour tenter de mieux valoriser des dialogues et des échanges plus ou moins profonds entre les personnages principaux, le tout avec la présence d’un casting haut de gamme et « sans égal » : Alan Rickman aussi intransigeant que majestueux (et pour cause, vu son rôle ici !), Kate Winslet toujours abonnée aux prestations de courtisée - à défaut de courtisane – fière et indépendante (Hamlet ; Titanic ; Quills, la plume et le sang ; Raison et sentiments), Matthias Schoenaerts (Bullhead ; De rouille et d’os ; Quand vient la nuit ; Suite française) en maître certes précurseur et entier mais pour le moins sombre, l’air sévère et pas fun pour 2 sous, sans oublier Stanley Tucci (Le Diable s’habille en Prada ; la saga Hunger Games) en duc d’Orléans qui s’amuse un peu des embrouilles et autres manigances qui existent de la cour du roi, tout en venant égayer assez brièvement ici et là cette peinture d’époque aussi authentique que savamment enveloppée, pas loin de la gravure épique luxueuse, à la fois rigide et bien ordonnée, et cela dans tous les sens du terme !

C.LB



 
 
 
                                                      cinema - theatre - musique