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Good kill (sur Ciné + Frisson)

Sortie  le  05/06/2021  

De Andrew Niccol avec Ethan Hawke, Bruce Greenwood, Zoé Kravitz, Jake Abel, January Jones, Fatima El Bahraouy et Ryan Montano (sur Ciné + Frisson les 05, 09 et 10/06)


Le Commandant Tommy Egan, pilote de chasse reconverti en pilote de drone, combat 12 heures par jour les Talibans derrière sa télécommande, depuis sa base, à Las Vegas. De retour chez lui, il passe l’autre moitié de la journée à se quereller avec sa femme, Molly et ses enfants. Tommy remet cependant sa mission en question. Ne serait-il pas en train de générer davantage de terroristes qu’il n’en extermine ? L’histoire d’un soldat, une épopée lourde de conséquences.

Ce film est un véritable cas de conscience, autant à travers le sujet qu’il développe que vis-à-vis des spectateurs qui le regardent, mis à dure épreuve de façon quasi permanente pour tous ceux qui le vivent au quotidien en obéissant aux ordres de leurs supérieurs : pensez donc, être confortablement assis dans un fauteuil à tirer de vrais missiles, par l’intermédiaire d’un drone (avion « télé »commandé à distance) via un petit écran de télévision, pour frapper un ennemi « potentiel » - en l’occurrence ici des terroristes afghans situés à plus de 10.000 km de là -, puis rentrer bien sagement chez soi une fois le travail accompli comme si de rien n’était (le boulot quoi !). Il y a de quoi être particulièrement tiraillé voire obsédé par cet état de fait au bout d’un moment – tuer à distance sans sourciller -, surtout que ce type de guerre dit « juste » - ou bien ne serait-ce pas juste une guerre de plus ? – est un sacré dilemme pour n’importe lequel d’entre nous. Alors, crime de guerre ou non en pareil cas ? Difficile de répondre à cette question mais, néanmoins, notre sens moral en prend un coup !
Le réalisateur Andrew Niccol (Bienvenue à Gattaca ; Simone ; Time out ; Les âmes vagabondes) a su parfaitement maîtriser son scénario à la fois cynique et virulent – au même titre d’ailleurs que certains de ses précédents longs métrages comme par exemple le fameux Lord of war ! -, en y ajoutant non pas des décors et des cadrages à profusion (l’ensemble se passe surtout entre la base militaire et la maison du commandant) mais tout simplement, sur fond d’une BO parfois « hard(ente) », une bonne dose de profondes réflexions aussi nuancées que choquantes - cela devient un « cercle vicieux sans fin » -, limite obscènes – provoquées par des hommes « qui ne sont pas à plaindre » -, de réquisitoires contre un gouvernement en place – ici celui U.S. sous le couvert de « frappes chirurgicales » approuvées par quelques hautes instances peu scrupuleuses et malgré les « dommages collatéraux » que cela peut entraîner parfois -, ainsi que de situations et comportements inspirés de faits réels – avec des « cibles verrouillées » et des « splashs » à la clé -. De quoi avoir froid dans le dos quand on y pense !
Pour démontrer tout ce processus intérieur plein de sentiments, pensées et autres situations tel que le remords, le metteur en scène a à nouveau fait appel à son acteur fétiche, Ethan Hawke (Training day ; la trilogie Before sunrise, Before sunset et Before midnight ; Assaut sur le central 13 ; American nightmare ; Hercule) - qu’il avait déjà dirigé dans Bienvenue à Gattaca et Lord of war -, pour interpréter ce pilote désabusé, aigri, fatigué et souvent ailleurs, lui qui ne vole pas – ou du moins plus réellement ! – mais qui rêve de retourner au combat, au « vrai ». Avec son look typiquement d’aviateur, un peu à la Tom Cruise dans Top gun (blouson en cuir et lunette Ray-Ban), il représente parfaitement la « vie de rêve » dont espère chaque américain qui se respecte, avec néanmoins ses parts d’ombre (refuser les ordres ?), de fêlure (alcoolo dès levé du lit) et de soucis (entre autres celui de jalousie avec sa femme).
Omniprésent pendant 1h45, il donne toute sa dimension à la fois touchante et pathétique à son personnage torturé de perpétuel mal-être. Voilà donc un discours intelligent, certes observateur et psychologique mais aussi réactif, protestataire et dérangeant, une plaidoirie critique pour ne pas dire accusatrice à l’encontre de décisions prises par l’armée (et également la CIA !) dans pareil conflit, qui en fera sans doute réfléchir plus d’un sur la portée de tels actes, même en période d’intenses croisades contre le terrorisme international...

C.LB



 
 
 
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