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Yves Saint Laurent (sur Canal + Cinéma)

Sortie  le  05/05/2023  

De Jalil Lespert avec Pierre Niney, Guillaume Gallienne, Charlotte Le Bon, Laura Smet, Marie de Villepin, Nikolai Kinski, Ruben Alves, Astrid Whettnall et Marianne Basler


Paris, 1957. A tout juste 21 ans, Yves Saint Laurent est appelé à prendre en main les destinées de la prestigieuse maison de haute couture fondée par Christian Dior, récemment décédé. Lors de son premier défilé triomphal, il fait la connaissance de Pierre Bergé, rencontre qui va bouleverser sa vie. Amants et partenaires en affaires, les 2 hommes s’associent 3 ans plus tard pour créer la société Yves Saint Laurent. Malgré ses obsessions et ses démons intérieurs, Yves Saint Laurent s’apprête à révolutionner le monde de la mode avec son approche moderne et iconoclaste.

Le mimétisme est total, voire flagrant, autant dans le visage allongé et l’allure élancée que les gestes réservés et la façon de parler, les poses alanguies en prime. Bref, le performant Pierre Niney (vu dans Les émotifs anonymes, Les neiges du Kilimandjaro, J’aime regarder les filles, et 20 ans d’écart) devient sous nos yeux un Yves (Mathieu) Saint-Laurent intimidé plus vrai que nature, avec ses petites manies et autres tics bien connus, tout comme d’ailleurs la prestation au diapason du reste de la distribution qui est pour la plupart une évidence même jusqu’aux seconds rôles, Nikolai Kinski en Karl Lagerfeld compris. De quoi être vite plongé dans une époque certes révolue à travers une agréable reconstitution de cette belle période (images sépia de circonstance), grâce notamment aux nombreux ports de certains costumes originaux et des plus emblématiques robes du génial créateur, mais pas si éloignée que cela de nous, depuis la fin des années 50, au moment de ses tous débuts, jusqu’aux années 2000, juste avant sa disparition en 2008 !
C’est un hommage non dissimulé et encore moins déguisé que porte, pour sa 3ème mise en scène (après 24 mesures et l’excellent Des vents contraires), le réalisateur - et acteur - Jalil Lespert à ce personnage qui a marqué indéniablement l’histoire de la mode - haute couture comme prêt-à-porter - de son empreinte indélébile. Il a eu pour cela l’accord et autres autorisations de Pierre Bergé en personne pour tourner dans les lieux où lui et son défunt compagnon ont vécu ensemble (entre autres dans leur appartement de l’avenue Marceau et le jardin Majorelle à Marrakech). Mais il ne s’arrête pas là, dépeignant aussi toutes les défaillances et autres excès en tous genres de cet inventeur de génie à l’existence plutôt dissolue, entre son côté maniaco-dépressif et son addiction aux drogues, son besoin de draguer et même de racoler et ses amants, ses engueulades et ses crises avec l’homme de sa vie, Pierre Bergé, interprété par le formidable Guillaume Gallienne qui raconte, sans minauder d’aucune sorte, leur rencontre (« toi, tu as le talent, moi, je m’occupe du reste ! ») ainsi que leur longue idylle avec un regard bienveillant, à la fois de compréhension mais également de soutien, aussi bien physique que morale et intellectuel. En résumé, on découvre que ce n’était pas toujours « rose » entre eux, loin de là !
Si Jalil Lespert se cantonne plus souvent à montrer le côté intime du couple, avec les multiples faiblesses d’Yves Saint Laurent, sa morale plus que douteuse, ses déviances mais aussi les excuses qui s’en suivent à chaque fois à l’encontre de son partenaire et pygmalion, ce dernier tentant tant bien que mal de « le protéger de tous », on assiste tout de même à quelques passages de création et de défilés, notamment la période Mondrian en 1965 (inspirée du peintre du même nom) et celle intitulée Révolution en 1966 (avec le smoking porté par des femmes). Quoi qu’il en soit, vous n’apprendrez rien de plus ni de nouveau – et cela malgré une 5ème adaptation au cinéma de la vie et de la carrière d’Yves Saint Laurent - dans cette profonde, sincère et en réalité très classique histoire d’amour que vous ne sachiez déjà, si ce n’est de découvrir quelques anecdotes plus ou moins « croustillantes » ici et là dans la plus pure tradition cinématographique qui soit, à travers des discours assez linéaire sans la moindre véritable aspérité et sur fond de grandes envolées musicales pour sensibiliser l’ensemble. En résumé, un biopic élégant en forme de devoir appliqué et (presque) exemplaire, qui semble avoir respecté à la lettre et aussi fidèlement que possible la mémoire de l’intéressé concerné avec l’entière approbation de son autre « moitié » encore vivante....

C.LB



 
 
 
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