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Blood ties (sur Ciné + Frisson)

Sortie  le  01/10/2023  

De Guillaume Canet avec Clive Owen, Billy Crudup, Marion Cotillard, Mila Kunis, Zoé Saldana, Matthias Schoenaerts et James Caan


New York, 1974. Chris, la cinquantaine, est libéré pour bonne conduite après plusieurs années de prison pour un règlement de compte meurtrier. Devant la prison, Frank, son jeune frère, un flic prometteur, est là, à contrecœur. Ce ne sont pas seulement des choix de « carrières » qui ont séparé Chris et Frank, mais bien des choix de vies et une rivalité depuis l’enfance. Leur père Léon, qui les a élevés seul, a toujours eu pour Chris une préférence affichée, malgré les casses, la prison… Pourtant, Frank espère que son frère a changé et veut lui donner sa chance : il le loge, lui trouve un travail, l’aide à renouer avec ses enfants et son ex-femme, Monica. Malgré ces tentatives, Chris est vite rattrapé par son passé et replonge. Pour Frank, c’est la dernière des trahisons, il ne fera plus rien pour Chris. Mais c'est déjà trop tard et le destin des deux frères restera lié à jamais.

Il semblerait que le réalisateur et acteur Guillaume Canet (Mon idole ; Ne le dis à personne ; Les petits mouchoirs) se soit fait plaisir pour son 4ème long-métrage, en mettant en scène lui-même un remake d’un film dans lequel il jouait, Les liens du sang de Jacques Maillot sorti en 2008, mais cette fois en le transposant en langue anglaise et en le tournant aux USA, d’autant qu’il a reproduit ici un peu l’ambiance des polars d’antan, ceux très représentatifs des années 70, à la façon d’un Don Siegel, d’un Sam Peckinpah ou d’un William Friedkin, pas loin de l’esprit de l’Inspecteur Harry, des Chiens de paille ou de French connection par exemple, avec le style visuel correspondant bien évidemment. Certes, la reconstitution de cette période révolue est assez réussie, costumes et chemises pelles à tarte de circonstance, BO et voitures d’époque comprises, ainsi que les allures qui vont avec et autres dégaines en prime, sans oublier la façon de filmer de jadis et le côté légèrement « sale » de la pellicule. Bref, de ce point de vue-là, c’est un sans faute !
Mais en revanche, pour ce qui est du sujet, de la mise en scène, du montage, des personnages et des acteurs, c’est une toute autre affaire ! Son histoire de fraternité malmenée ou plutôt mise à dure épreuve est plombée par des situations maintes fois déjà vues à l’écran, par un manque évident de dialogues de plus mal écrits, sans intérêt particulier et d’une banalité rare, voire même confondante de futilité, le tout sur fond d’expressions ressassées, d’engueulades ridicules et de réactions grotesques (notamment les bagarres entre les 2 frères proches de celles de gamins), par une réalisation assez « moue du genou » qui n’invente rien de nouveau ni d’original, par des plans attendus et souvent prévisibles dès le début de la scène, par une musique de films qui fait office de remplissage, et par un casting de stars inadéquate : cela fait beaucoup de ratages pour un seul film !
Si Clive Owen a le profil approprié dans un registre de truand plutôt inhabituel pour lui (il n’a interprété pratiquement que des « gentils », du Roi Arthur à Duplicity), certains ne font pas trop le poids, que ce soit Billy Crudup (The Hi-Lo country ; Jesus’son ; Presque célèbre : Big fish ; Raisons d’état ; Public enemies) avec sa moustache à la Tom Selleck (de la série télévisée Magnum) dans le rôle du frérot bien sage et rangé, ou Marion Cotillard qui se la joue un max la « putin » de service sans aucune sincérité et sans avoir un instant le gabarit correspondant. Quant aux autres protagonistes, ni Mila Kunis (Black swan), ni Zoé Saldana (Avatar), ni Matthias Schoenaerts (Bullhead) et encore moins James Caan (Rollerball et Le parrain 1 & 2) n’arrivent à véritablement tirer leur épingle du jeu, faisant leur minimum syndical avec la satisfaction du travail accompli, histoire de faire plaisir au petit « frenchy » de passage, Guillaume Canet.
Comment ce dernier en est arrivé à « faire genre », grâce notamment à la présence de James Gray (La nuit nous appartient) en tant que coscénariste, en ayant si peu d’inspiration, autant dans le choix de ses acteurs que dans celui du script, à travers ce thriller « vieilli », peu captivant et d’un académisme éhonté ? Malgré un hommage avoué au cinéma américain, il n’y a pas de souffle intriguant, pas la moindre profondeur d’esprit, pas de suspense, pas de complexité et pas de rythme si ce n’est ceux déjà-vu chez ces illustres prédécesseurs ! Canet a beau avoir filmé outre-Atlantique, il n’a pas la patte U.S. de ces derniers et ça se sent à l’écran, vous savez celle du français qui essaye de bien faire, du moins d’être à la hauteur et si possible dans toute sa splendeur.
A quoi bon tenter le diable en refaisant ce qui a déjà été fait - et plutôt bien d’ailleurs à l’époque, avec un certain succès à la clé - ? On se le demande, d’autant que la version originale avait certes peu de moyens mais beaucoup d’ambition et de caractère. Bref, faire aujourd’hui du vieux avec des techniques disons modernes mais néanmoins classiques dans leur représentation, ça dépassé et ça se s’improvise pas. Le syndrome du réalisateur étranger qui veut se confronter au style américain dans l’idée de faire aussi bien, voire mieux que lui, c’est de l’inconscience ou de l’arrivisme patentée, ainsi que de la naïveté ou de la prétention mal placée !

C.LB



 
 
 
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