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Case départ (sur Canal + Grand Ecran)

Sortie  le  31/03/2023  

De Lionel Steketee, Fabrice Eboué et Thomas Ngijol avec Fabrice Eboué, Thomas Ngijol, Stéfi Celma, Eriq Ebouaney et Etienne Chicot (les 31/03 + 04/04)


Demi-frères, Joël et Régis n’ont en commun que leur père qu’ils connaissent à peine.
Joël est au chômage et pas vraiment dégourdi. La France, « pays raciste » selon lui, est la cause de tous ses échecs et être noir est l’excuse permanente qu’il a trouvée pour ne pas chercher du travail ou encore payer son ticket de bus.
Régis est de son côté totalement intégré. Tant et si bien qu’il renie totalement sa moitié noire et ne supporte pas qu’on fasse référence à ses origines. Délinquance et immigration vont de pair si l’on en croit ses paroles.
Réclamés au chevet de leur père mourant aux Antilles, ils reçoivent pour tout héritage l’acte d’affranchissement qui a rendu la liberté à leurs ancêtres esclaves, document qui se transmet de génération en génération. Faisant peu de cas de la richesse symbolique de ce document, ils le déchirent.
Décidée à les punir pour le geste qu’ils viennent de faire, une mystérieuse vieille Tante, qui les observait depuis leur arrivée aux Antilles, décide de leur faire remonter le temps, en pleine période esclavagiste ! Parachutés en 1780, ils seront vendus au marché comme esclaves. Les 2 frères vont alors devoir s’unir, non seulement pour s’évader de la plantation mais aussi pour trouver un moyen de rentrer chez eux au 21ème siècle…


Comment faut-il prendre ce film, comme un pamphlet engagé contre le racisme persistant et l’esclavagisme latent, ou bien alors comme une comédie satirique qui se moque ouvertement des clichés autour de l’intégration et autres caricatures éhontées sur le sujet ? Là est toute la question qu’on est en droit de se poser devant cette réalisation pour le moins constructive et audacieuse, un projet aussi original qu’ambitieux, qui transporte 2 « noirs » d’aujourd’hui au temps du trafic d’esclaves dans les Antilles françaises.
Que croyez-vous qu’il va leur arriver ? Un tas d’aventures pour le moins mouvementées et pas mal de réflexions sur leurs sorts en pareil cas. Difficile en effet d’imaginer les conditions de vie et d’exploitation dans lesquelles tous ces hommes et toutes ces femmes ont été obligés d’endurer contre leur gré à cette époque peu glorieuse de l’Histoire ! Avec un soucis minutieux de reconstitution à cette période, à la fois authentique, réaliste et sans complaisance (le tournage a eu lieu à Cuba), aussi proche que possible de ce qu’on du vivre ces « nègres », nous voilà plongé à travers 2 cultures contradictoires qui s’entrechoquent et 2 siècles totalement différents qui se juxtaposent.
D’un côté, il y a celui qui a bien réussi sans trop se soucier de ses origines (le comique Fabrice Eboué adepte du stand-up, vu notamment dans Fatal) et de l’autre, celui qui profite tout en rejetant en bloc le système (Thomas Ngijol du Jamel Comedy Club, aperçu entre autres dans Vilaine et La chance de ma vie). Ce duo d’acteurs principaux, également co-scénaristes et co-réalisateurs du film, fonctionne à merveille, jouant parfaitement la carte, pour l’un, du métis dégonflé mais parfaitement intégré dans la société dite blanche, et pour l’autre, celle du rebelle lâche et dépité, plutôt réfractaire à toute forme d’insération dans ce même univers. Ils vont donc forcément s’affronter, le tout sur fond de canne à sucre, de coups de fouet et de vengeance longuement ruminée. On retiendra ici plus spécialement leur rôle respectif.
Sans vouloir réparer une quelconque erreur historique, ni refaire l’Histoire à leur image et encore moins transformer radicalement le nouvel environnement dans lequel ils vont dorénavant vivre avec leurs faibles moyens, ces 2 « blacks » en décalage complet vont devoir s’adapter tant bien que mal à leur nouveau statut d’humain, si on peut vraiment l’appeler comme çà ! Entre gravité et rigolade, propos outranciers, voire abominables, et réparties humoristiques, ce constat social et identitaire d’un autre temps tente de nous donner une bonne leçon de tolérance, de dignité, de sagesse, de respect et de fraternité vis-à-vis d’autrui et cela même dans les pires situations racistes qui soient.
A l’inverse des fameux Visiteurs de Jean-Marie Poiré, voilà un moyen comme un autre, certes léger dans sa forme mais sérieux dans son fond, de faire comprendre fort intelligemment à chacun, les mentalités d’esclavagisme encore en vigueur et qui persistent toujours en ce bas monde ! Triste réalité des choses qui, malheureusement, correspondent à notre temps……

C.LB



 
 
 
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