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Le discours d’un roi (sur Canal + Grand Ecran)

Sortie  le  14/12/2024  

De Tom Hooper avec Colin Firth, Geoffrey Rush, Helena Bonham Carter, Guy Pearce, Derek Jacobi et Timothy Spall


D’après l’histoire vraie et méconnue du père de l’actuelle Reine Elisabeth, qui va devenir, contraint et forcé, le Roi George VI, suite à l’abdication de son frère Edouard VIII.
D’apparence fragile, incapable de s’exprimer en public, considéré par certains comme inapte à la fonction, George VI tentera de surmonter son handicap grâce au soutien indéfectible de sa femme et d’affronter ses peurs avec l’aide d’un thérapeute du langage aux méthodes peu conventionnelles.
Il devra vaincre son bégaiement pour assumer pleinement son rôle, et faire de son empire le premier rempart contre l’Allemagne nazie.


Il va s’en dire que ce film, notamment précédé d’une réputation fort élogieuse et récompensé au dernier festival de Toronto par le Prix du Public (en attendant prochainement les Golden Globes où il est nominé 7 fois, et 8 fois pour les British Independent Film Awards, l’équivalent de nos Césars !), ne peut qu’éveiller la curiosité de chacun et donc susciter le plus vif intérêt auprès d’un très grand nombre. Néanmoins, son titre, aussi bien en version originale que française, n’appelle pas forcément à un pareil engouement de la part de tout le monde et pourtant, croyez-le bien, la perle est vraiment à l’intérieur de ce récit, épisode inédit mais bel et bien historique, quoique sûrement inconnu du grand public, même d’origine anglaise.
En effet, ce « détail » plutôt embarrassant, un défaut d’élocution persistant au point d’en être handicapant pour sa fonction vu son haut rang, a bien failli coûter la réputation à son altesse royale George VI, ou du moins aurait pu l’empêcher de servir de modèle légitime et convaincant, et surtout de réussir à convaincre l’ensemble de son peuple, où qu’il soit dans le monde, de déclarer la guerre à Hitler, et cela après un important discours radiophonique à la portée internationale (diffusé dans les 58 pays qui composent l’Empire britannique à cette époque), où il ne fallait ne surtout pas trébucher, ni montrer une quelconque faiblesse ou hésitation, et encore moins prouver quelques peurs et autres tares. Vous comprenez mieux maintenant l’enjeu comme la portée d’un tel speech ainsi que le titre du film (adapté d’une pièce montée dans un petit théâtre alternatif) !
Quoi qu’il en soit, la partie n’était pas gagner d’avance et retrouver sa voix, surtout en tant qu’orateur devant un micro, n’était pas chose aisée. Fort heureusement, la participation oh combien indispensable d’un « médecin » plutôt original fut nécessaire, un soi-disant orthophoniste praticien sans diplôme ni formation mais plein d’aplomb, aux pratiques peu orthodoxes, voire controversées, qui différent radicalement de ces confrères, ainsi qu’à l’allure comme à la conduite singulières, hors des usages princiers, d’autant qu’il traite n’importe lequel de ces patients d’égal à égal. Vous imaginez la situation quand il s’agit du duc d’York qui va devenir roi d’Angleterre ! Mais ne dit-on pas justement : au grand « malade », les grands remèdes !
Ce drôle d’olibrius aussi détendu que fantaisiste est joué par l’impayable Geoffrey Rush (Sunshine ; Shakespeare in love ; Elizabeth 1 & 2 ; Quills la plume et le sang ; Pirates des Caraïbes), irrésistible de facétie et de décontraction comme de répartie, capable de corriger tout en tenant tête à sa majesté, interprétée par cet excellent Colin Firth (Un été italien ; Le drôle Noël de Scrooge ; A single man), ici plutôt mal à l’aise, quelque peu engoncé dans le protocole et obligé de subir des corrections indispensables à son (futur) rang et cela dans la plus grande discrétion possible. De son côté, Helena Bonham Carter (Retour à Howard’s end ; Frankenstein ; Les ailes de la colombe ; La planète des singes), dans la peau de son épouse la reine Elisabeth, irradie littéralement à l’écran grâce à son caractère souverain évident à forte présence persuasive, où elle en impose naturellement sans jamais forcer le trait. Quand aux autres, ils sont indispensables à la bonne marche de cette entreprise, seulement la 2ème réalisation de Tom Hopper, habituellement grand spécialiste de séries et de téléfilms britanniques : Guy Pearce (Priscilla folle du désert ; L.A. Confidential ; Memento) ressemble comme 2 gouttes d’eau à son personnage, le roi Edouard VIII qui deviendra le duc de Windsor ; Derek Jacobi (Le dossier Odessa ; Henry V ; Hamlet ; Gladiator ; Gosford Park) est parfait en archevêque de Westminster ; et Timothy Spall (Chambre avec vue ; Secrets et mensonges ; Intimité) est presque aussi ressemblant que Winston Churchill dont il épouse autant le timbre vocal que les formes physiques et les habitudes légendaires (le fameux gros cigare à la main !).
Comment voulez-vous qu’après cela, nous ne soyons pas séduit par tant d’acteurs à l’aisance innée, tous aussi prestigieux les uns que les autres, ainsi que par tant de dialogues tout en nuance et mitonnés aux petits oignons, subtilement écrits et parfaitement dits (« Il fallait que je trébuche un peu pour qu’on me reconnaisse ! ») ? C’est un régal aussi bien pour les yeux (certains décors typiquement anglais) que des oreilles (le texte sans oublier la BO d’Alexandre Desplat), et l’on devine aisément le destin glorieux de cette production anglo/australienne qui va à coup sûr remporter un succès comme un grand nombre de distinctions bien méritées, sa majesté oblige !

C.LB



 
 
 
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