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La personne aux 2 personnes (sur Canal + Décalé)

Sortie  le  26/03/2022  

De Nicolas & Bruno avec Alain Chabat, Daniel Auteuil et Marina Fois (sur Canal + Décalé les 26 et 31/03 + 04/04)


C’est l’histoire de Gilles Gabriel, ex-star de la chanson des années 80, qui meurt dans un accident de voiture causé par Jean-Christian Ranu, un petit employé coincé de la Cogip, une grande entreprise de La Défense. Mais Gilles Gabriel n’est pas totalement mort : son esprit a en fait atterri dans la tête de Jean-Christian qui ne comprend pas bien qui lui parle tout d’un coup. Quant à Gilles qui conserve toute sa fougue, il n’a pas le contrôle des mouvements de son hôte. Gilles et Jean-Christian passent par tous les états avant de se rendre à l’évidence : il va falloir faire avec, à 2 dans la même personne, malgré leurs personnalités opposées. Condamnés à une extrême promiscuité, ils vont s’apprivoiser, s’épanouir et se surprendre.

Avant toute chose, ne louper pas le générique de début, il met très vite dans l’ambiance de cette comédie fantastique qui semble partir sous les meilleures augures et pour le moins jubilatoire, aux vues du casting ! Pensez donc, Alain Chabat, ex-icône de la variété FM des années 80, en voiture chantant un vieux tube populaire de cette époque (« Tropiques »), ça vaut le détour ! Le hic, c’est qu’il disparaît très peu de temps après de l’écran pour ne laisser qu’ « apparaître » uniquement sa voix off qui vient petit à petit envahir mentalement la tête de ce pauvre Daniel Auteuil en comptable ringard et vieux garçon, seul, décalé, effacé, étriqué et bourré de principes, responsable de l'accident fatal. A l’intérieur du corps de ce dernier, Alain Chabat va tenter de le raisonner, de gérer ce gros problème de "pénétration" dans l'esprit d'un autre, de cohabiter tant bien que mal avec lui et même d’aider sa nouvelle « physionomie » à devenir un gagnant et de vaincre ses espoirs, préjugés, complexes et autres tares.
A partir de ce cas de « figure », on pouvait s’attendre à un déluge de commentaires désopilants, ce qui est parfois le cas (« c’est çà l’enfer, que des bureaux ! »), et surtout une ribambelle de situations tordantes, ce qui l’est moins. En effet, pris dans cette enveloppe charnelle, Alain Chabat n’arrive pas toujours à faire passer un certain délire, à communiquer le grain de folie nécessaire à un tel phénomène et un pareil cas aussi iconoclaste soit-il, même si pour cela il pousse Daniel Auteuil dans ses derniers retranchements, à savoir en faire parfois des tonnes, un peu trop d’ailleurs dans le grotesque (Daniel Auteuil en slip) ou le ridicule (des cadres en cravate dansants à une assemblée générale), histoire de décrocher le rire à chacune de ses élucubrations.
Loin d’une escalade éventuelle dans le non-sens ou l’absurdité la plus totale, ce scénario bancal et souligné pour ne pas dire appuyé, qui dérape exagérément et par moment outrageusement, manque souvent de sérieux et de subtilité, à part Marina Fois, toujours aussi impeccable et pleine de nuances non forcées dans un rôle de collègue revêche et collet monté, à cheval sur la bonne image de l’entreprise. Certes, cette situation de transfert qui permet de se retrouver à l’intérieur d’un autre, n’est pas nouvelle au cinéma (souvenez-vous de la comédie américaine, Dans la peau d’une blonde, et dernièrement dans un registre cette fois dramatique, Si j’étais toi de Vincent Perez), mais elle est ici mal exploitée alors que le milieu d’une « boîte » est en général pleine d’une richesse incroyable et de ressources parodiques.
Il y a un manque évident de rythme (ça s’étire légèrement en longueur et sans vivacité….d’esprit !) comme de renouvellements comiques (ça tourne en rond avec des sketches déjà-vu et des blagues potaches qui restent souvent au 2ème degré), avec une absence de séquences abouties flagrante (la caméra reste focalisée sur Auteuil, pas toujours drôle, au détriment des seconds rôles parfois beaucoup plus croustillants comme François Damiens en médecin, et des participations tel que Joey Star). Bref, une fausse bonne idée certes audacieuse et fantaisiste pour un premier film simple et touchant, à la logique pour le moins spécifique et à l’univers particulier, mais qui ne réussit pas à convaincre entièrement : cette "personne" ne tient pas toutes ses promesses, d'autant plus qu'elle aurait pu beaucoup plus dérider nos zygomatiques au lieu de se cantonner à forcer le trait d’humour, et à tenter de nous faire croire à son histoire invraisemblable qui louche vers la schizophrénie dans l’espoir de décoincer un tant soit peu l’atmosphère d’emballement d’un sujet pas totalement développé, voire suffisamment maîtrisé !

C.LB



 
 
 
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