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2 sœurs pour un roi (sur Ciné + Emotion)

Sortie  le  13/10/2021  

De Justin Chadwick avec Natalie Portman, Scarlett Johansson, Eric Bana, Jim Sturgess, Mark Rylance et Kristin Scott Thomas (sur Ciné + Emotion les 13, 16, 17, 20, 26, 28 et 29/10)


Quand la rumeur se répand que le roi Henry VIII ne partage plus la couche de la reine Catherine, son épouse incapable de lui donner un héritier mâle, Sir Thomas Boleyn rêve de gagner la faveur royale grâce à sa fille aînée, Anne. L’ambitieux projet de Sir Thomas est cependant quelque peu contrarié quand le roi s’éprend de son autre fille, Mary.

Les mœurs à la cour d’Angleterre semblaient être bien légères à cette époque, à en croire ce film historique qui relate les pérégrinations sexuelles de ce grand roi dans l’incapacité d’avoir un descendant mâle ! Ce n’est pas faute pourtant de coucher avec de nombreuses maîtresses, âprement triées sur le volet, mais la nature est ainsi faite qui ne permet pas d’être à 100% sûr d’avoir un garçon plutôt qu’une fille à la naissance. C’est justement là qu’intervient le père de 2 jeunes ravissantes filles (et d’un fils aussi), avide de pouvoir, de célébrité et de richesse, qui par alliance d’intérêts, va les pousser habilement et les placer subtilement dans les pattes du roi afin de s’octroyer les faveurs comme les avantages de la cour. Un papa qui voudrait vendre ses rejetons ne s’y prendrait pas autrement ! Tel était le droit et l’arrangement que se permettaient et surtout qu’exerçaient les pères de famille d’une certaine noblesse dite de gentilhomme pour espérer avoir les bonnes grâces d’une tête couronnée, avec peut-être à la clé quelques privilèges en retour, un bon titre ou du moins un bon parti en prime pour leurs progénitures femelles, une monnaie d’échange bonne qu’à être des mères pondeuses et puis délaissées après acte coïtale et éventuellement sortie fœtale.
Au vue du titre de ce film, on pourrait aisément penser que ses 2 sœurs complotent entre elles pour se partager à concurrence égale et à tour de rôle la couche royale, telles 2 gourgandines prêtes à tout pour ravir à l’autre les faveurs du roi. On n’est pas loin de la vérité sauf que ses 2 envoûteuses et « diablesses » ne sont ni vraiment des putes, pardon, des femmes de petite vertu, ni totalement des hautaines en mal de sensations fortes, voire viriles. Elles sont malgré elles les victimes d’un père intéressé et d’un roi au penchant libidineux pour la chaire fraîche avec comme objectif la possibilité d’avoir un héritier mâle digne de ce nom. Alors, notre bon roi va butiner ou plutôt culbuter la première puis la seconde dans l’espoir d’avoir un garçon de l’une des 2. C’est ce qu’il aura avec succès de la première mais qu’il répudiera pour les beaux yeux de la seconde, uniquement bonne à enfanter d’une fille (la future reine Elizabeth que l’on a pu admirer dans les 2 Elizabeth du réalisateur anglais Shekhar Kapur) et à envoûter, voire ensorceler sa conscience dans le seul but de convoiter le titre suprême à la place de la reine actuelle. Quand la frêle Mary est alitée pour cause de naissance proche, l’émancipée Anne (elle a eu le temps de se marier en cachette avec un noble et de passer quelques mois à la cour du roi de France) rapplique dare-dare dans l’espoir d’avoir sa part de jouissance elle aussi. C’est que l’une est autant désintéressée que l’autre calculatrice, aveuglée par le pouvoir à portée de mains (ou de reins selon le moment !), alimentant une rivalité pleine de jalousie et maîtrisant cette situation à sa guise. Il s’en suivra bien évidemment des querelles entre sœurs, puis des rabibochages avant que l’irrémédiable sentence tombe pour l’une.
On ne rigole pas avec la bagatelle, tel est le désir du roi : le cul est une affaire d’Etat, qu’on se le dise ! Bref, on le divertie et on le séduit mais il faut se plier à sa volonté, à son bon vouloir, et pouvoir assurer après (assumer serait plus juste), comme tout contrat de confiance en bonnes et dues formes qui se respecte. Si le pacte n’est pas honoré à la lettre et comme il se doit, c’est l’affront, la négligence, le mépris, le désintéressement, l’abandon, le bannissement, la déchéance aux yeux de tous, voire pire encore, la décapitation pure et simple. Tâter de la hache était quelque chose de possible, de facile et de rapide à cette période où provoquer le courroux d’une tête couronnée imprévisible et dangereux entraînait irrémédiablement la culpabilité et l’exécution ! Au final, quelle famille ! : sur les 3 frères et sœurs, 2 y passeront sans autre forme de procès, jugés coupables pour l’une, Anne, de trahison et d’adultère envers le roi et pour l’autre, George (Jim Sturgess, aperçu dans Across the universe), d’inceste sur la reine. En résumé, les frasques royales, dans tous les sens du terme (mots, détails et commentaires compris !), sont à l’honneur ici, servies par une reconstitution minutieuse et pour le moins somptueuse, ainsi que par un casting prestigieux à défaut d’être totalement harmonieux. En effet, autant Kristin Scott Thomas tire honorablement son épingle du jeu comme d’habitude en mère bien obligée d’accepter le bon vouloir de sa fripouille de mari (Mark Rylance, vu dans Intimité, qui a tout au long du film les yeux d’un chien battu et pour cause !), et Natalie Portman porte fièrement la couronne comme l’habit en Anne d’Angleterre minaudante et manipulatrice, autant Scarlett Johansson fait (pâle) figure de simple fille de ferme (d’où son désir d’ailleurs d’aller vivre à la campagne depuis le début !) en Mary (couche-toi-là !) docile et aimante, et Eric Bana (La chute du faucon noir, Hulk, Munich) en roi paradant tel un coq dans sa basse-cour et tout obsédé qu’il est, qui donne l’impression d’être plus porté sur les relations charnelles ou d’être plutôt dirigé par le bout de son sexe, que de s’occuper vraiment des obligations qu’il doit avoir envers son pays. Mais qui dirige cette nation pendant que le souverain a le feu dans son pantalon et éjacule sa semence dans toutes ces dames ?
Le réalisateur Justin Chadwick (dont c’est le premier long métrage) se limite en réalité à filmer principalement les nombreuses conquêtes, les quelques ébats et les accouchements de nos donzelles, avec certes un soucis du détail dans les décors comme les costumes, au lieu de chercher à raconter ce qui se tramait dans le royaume, tout comme les intrigues, complots et autres convoitises qui se déroulaient à la cour en ces temps-là. On n’apprend rien d’autre de l’histoire d’Angleterre à part que son roi était un baiseur de première, un bon coup comme on dit, et qu’il gérait plus ses affaires de cul que de celles de son pays. Un constat d’autant plus grave que le film ne tourne entièrement qu’autour des appartements d’Henry VIII et de ses rapports entre lui et ses dulcinées, le tout sur des personnalités à peine effleurées et des dialogues aussi peu fournis que pas très profonds. Tout cela reste très terre à terre et très charnel au lieu d’être plus politique, l’ensemble se cantonnant à n’être presque que physique et jalousie plutôt qu’à être énergique dans les rapports de force, orageux dans les liaisons et mouvementé dans les jeux de pouvoir. Il semble qu’on nous ait spolié d’un scénario à l’intrigue haletante au détriment d’un sujet historique scabreux, voire limite érotique !

C.LB



 
 
 
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