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La guerre des mondes (sur Ciné + Premier)

Sortie  le  02/05/2024  

De Steven Spielberg avec Tom Cruise, Dakota Fanning, Miranda Otto, Justin Chatwin et Tim Robbins


Ray Ferrier est un docker divorcé et un père rien moins que parfait, qui n’entretient plus que des relations épisodiques avec son fils Robbie, 17 ans, et sa fille Rachel, 11 ans. Quelques minutes après que son ex-femme et l’époux de cette dernière lui aient confié la garde des enfants, un puissant orage éclate. Ray assiste alors à un spectacle qui bouleversera à jamais sa vie. La terre se fend, laissant apparaître une machine de guerre juchée sur 3 énormes pieds métalliques. Avant que quiconque ait le temps de réagir, le monstrueux engin rase et réduit en cendre toutes les maisons du voisinage. Une journée ordinaire vire brutalement au cauchemar, la première phase d’une attaque massive d’extra-terrestres vient de s’engager…Battant en retraite devant ce mystérieux et implacable ennemi, Ray entame avec ses enfants un périlleux voyage à travers des paysages de désolation où s’étirent des colonnes de fuyards en détresse. Mais le danger est omniprésent, et aucun abri n’est assez solide pour offrir au trio le moindre répit. Où qu’ils aillent, rien ne peut plus sauver Rachel et Robbie…hormis l’inflexible volonté de Ray de protéger ceux qu’il aime….

Doit-on accuser Steven Spielberg de plagiat éhonté, tant le remake de La guerre des mondes de Byron Haskin, un classique de la science fiction tournée en 1953 d’après le célèbre roman de H.G.Wells, est copié quasiment à la lettre ? Même histoire, mêmes situations, même épilogue et mêmes effets spéciaux avec, bien sûr, quelques modifications plus élaborées par rapport à l’original ! La forme des vaisseaux des envahisseurs (pas ceux de la série télévisée avec David Vincent !) est à peu près la même, avec des longues pattes en plus qui leurs servent de pieds, mais leurs faisceaux lumineux destructeurs sont toujours identiques, ainsi que l’œil métallique qui s’infiltre chez les gens pour mieux les débusquer, tout comme la main inanimée de l’un des extra-terrestres qui sort de son vaisseau abattu à la fin.
Seule la trame est nouvelle, se voulant plus proche des préoccupations actuelles de nos chers amis, les américains. Au lieu d’avoir 2 scientifiques réputés qui font équipe pour étudier un curieux météore en Arizona, on a la chronique mouvementée d’un père divorcé et désarmé qui essaye tant bien que mal de garder sa progéniture près de lui, de la protéger pour qu’elle reste en vie et cela malgré les catastrophes et le chaos qui s’amoncellent autour d’eux. On ne peut pas dire que Spielberg se soit vraiment creuser la tête longtemps, voulant plutôt rendre un sérieux et digne hommage à l’un des premiers grands films de science-fiction. Il nous offre les mésaventures d’un homme plutôt simple qui se découvre des talents cachés de brave survivant, et même parfois de tueur quand le besoin s’en fait sentir. Alors que tout le monde autour de lui tombe comme des mouches, pardon, en cendres, lui arrive à faire démarrer la seule voiture encore en état de marche, à passer tous les barrages sans (presque) aucune égratignure, à raisonner les esseulés, les déboussolés et les déments, bref à garder son sang-froid et la tête froide en toute circonstance. A-t-il l’air angoissé, stressé, effrayé ou même terrifié ? Si sa fille l’est souvent (encore la jeune Dakota Fanning en petite fille épouvantée – souvenez-vous de Trouble jeu ? - pleine d’aplomb – souvenez-vous de Man on fire ? – à l’ego surdimensionné – souvenez-vous de I am Sam ? - et légèrement tête à claques – souvenez-vous de Le chat chapeauté ?), nous ne le sommes pas un seul moment.
Ceux qui l’ont vraiment été sont ceux qui ont entendu Orson Welles à la radio en 1938, déclenchant un vent de panique dans tout le pays ! On sait juste que cet homme est essoufflé et qu’il ne le montre en aucune occasion ! Et qui mieux que le populaire Tom Cruise pouvait incarner ce « héros » de notre époque, sans peur ni (aucun) reproche, qui sait braver le danger mieux que quiconque du haut de sa petite taille ? Dans le film, il s’appelle Ray (pas Charles !) Ferrier (c’est pou !), se comporte comme un enfant qui n’a pas grandit, s’habille comme un teenager mal dégrossi, mange du beurre de cacahouètes avec de la confiture et n’arrive pas à communiquer avec son fils aîné (interprété par Justin Chatwin qui d’ailleurs lui ressemble un peu dans la silhouette et l’allure mais dont on ne distingue presque jamais le visage). A par çà, ce père se découvre tout un coup des velléités de responsable de famille, court dans tous les sens pour mieux nous montrer les (beaux et grands) paysages du New Jersey, est présent sur tous les fronts comme sur tous les plans, et arrive même à faire exploser un de ces engins machiavéliques qui pompent le sang de leurs victimes.
Tom Cruise ne pouvait qu’accepter ce rôle pour le moins prévisible et évident d’homme de condition comme de dimension ordinaire, vaincu dans sa vie privée mais vainqueur dans sa nouvelle destinée, avec certes des problèmes familiaux à régler (comme tout le monde) mais capable de détruire l’ennemi en lui trouvant quelques failles dans son armure apparemment indestructible. Après le cauchemar qu’il vivait déjà dans Minority report du même réalisateur, Tom Cruise ne sait pas beaucoup foulé ni remis en question ces temps-ci, acceptant de jouer à nouveau le rédempteur après Le dernier samouraï et les redresseurs de torts (pauvre Tim Robbins qui n’aurait pas du lui faire une petite leçon de morale !) mais pas encore tout à fait le sauveur de l’humanité qu’on pouvait craindre en pareille situation. De plus, Steven Spielberg a poussé le bouchon un peu loin dans le genre propos exacerbés sur fond d’horreur et de peurs profondes, laissant dire à ces protagonistes que ces attaques au départ pouvaient être celles engendrées par des terroristes (bonjour le syndrome des attentats du 11 septembre !), et faisant croire que le sol des Etats-Unis est le seul qui ait été touché par cette impitoyable invasion (comme s’il n’y avait que les américains sur terre !).
A trop vouloir réaliser un film grand public et donc familial, il s’est encore fourvoyé dans des clichés éculés qui se veulent traumatisants, passant après la montée du militarisme en Allemagne avec le célèbre livre La guerre des mondes, et la paranoïa anticommuniste de la première version filmée, à celle de la crainte venue du ciel. D’ailleurs, il ne lésine pas sur les remarques impérialistes, du type « nous les américains, la plus grande puissance du monde, on est les plus forts, les seuls à pouvoir résister et à repousser l’ennemi où qu’il soit… ». Bref, on ne peut que constater l’ampleur des dégâts narratifs qui se bornent finalement à justifier la venue de ses aliens venus de l’au-delà plutôt hostiles comme des vampires qui finissent par crever, contaminés par notre air ambiant et peut-être par notre sang pas très sain.
Malheureusement, on ne peut pas sauver un film uniquement qu’avec la magie des trucages et des effets spéciaux qui sont, il faut bien le constater, fort réussis. Ces impressionnantes machines de guerre sont à la fois réalistes et inquiétantes, et les voir sortir de terre est un beau moment de réalisation. Il faut avouer tout de même que Steven Spielberg nous gratifie au passage de son grand talent de metteur en scène (ne pas louper le tournage continue et en rotation autour de la voiture lors de leur fuite éperdue sur les routes encombrées, les mouvements de foules gigantesques grâce à la participation de nombreux figurants, les batailles et les explosions multiples, ainsi que la scène du bateau qui se retourne et projette ses passagers et ses voitures dans l’eau). Mais parfois, certains décors ressemblent trop à du carton-pâte comme celui avec Tom Cruise et le couché de soleil sur un paysage désolé (on se croirait dans Autant en emporte le vent quand Scarlett O’Hara découvre les atrocités de la guerre de sécession).
Néanmoins, avait-il besoin de faire un remake copie/conforme sans y apporter un regard neuf et nouveau, ni une petite touche personnelle, le tout bouclé en très peu de temps (un tournage de cette envergure en seulement 3 mois, c’est plutôt risqué !) ? Il avait eu plus de créativité, de richesse, de flaire et de panache, dans ses précédentes productions fantastiques telles que Rencontres du 3ème type et surtout E.T. D’ailleurs, ce dernier, dont il s’amuse à nous montrer le vrai visage ici 20 ans après, doit se retourner dans sa lointaine planète en apprenant que son père créateur est devenu moins optimiste et plus sombre, moins confiant et plus désorienté, que dans les années 80 !

C.LB



 
 
 
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