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L’empire des loups (sur Canal + Grand Ecran)

Sortie  le  12/06/2022  

De Chris Nahon avec Jean Reno, Arly Jover, Jocelyn Quivrin et Laura Morante (sur Canal + Grand Ecran les 12 et 23/06)


Anna Heymes, la trentaine, est l’épouse d’un des plus hauts fonctionnaires du Ministère de l’Intérieur. Depuis plus d’un mois, elle souffre d’hallucinations terrifiantes et de régulières crises d’amnésie, au point de ne plus reconnaître le visage de son propre mari et même de commencer à douter de l’honnêteté de ce dernier. Pendant ce temps, dans le Xème arrondissement, Paul Nerteaux, un capitaine de police acharné, se voit confier une enquête concernant la mort de 3 femmes d’origine turque qui travaillaient dans des ateliers clandestins et dont les corps ont été retrouvés atrocement mutilés. Pour l’aider à infiltrer la population turque du quartier, Nerteaux n’a d’autre solution que de faire appel à Jean-Louis Schiffer, un de ses anciens collègues connu pour sa réputation de flic implacable.

Aurons-nous peut-être la chance un jour de bien tout comprendre des adaptations cinématographiques dont font l’objet régulièrement les romans de Jean-Christophe Grangé ? Déjà auteur du célèbre polar Les rivières pourpres, on avait eu un certain mal à discerner toute l’intrigue qui résidait dans ce film où il était question d’une enquête policière en forme de jeu de pistes complètement abracadabrant et pour le moins nébuleux. C’est exactement la même chose qu’on retrouve ici avec ce nouveau film qui ne brille ni par sa limpidité apparente, ni par sa complexité évidente et encore moins par ses discernements.
Et pourtant, on aimerait bien adhérer dès le départ à cette folle recherche qui mène 2 hommes sur une série de meurtres atroces, commis dans la communauté turque de Paris. On voudrait tellement que le début de cette histoire, qui doit s’annoncer mouvementée, le soit un peu plus pour éviter qu’on ne s’assoupisse ou qu’on lève les yeux au ciel en se demandant quant est-ce que l’aventure va vraiment décoller. On espérait une intrigue à tiroirs palpitante, des rebondissements ingénieux, des poursuites audacieuses et des réflexions subtiles, mais point de cela à l’horizon.
C’est du gros blockbuster à la française que nous a pondu là le réalisateur Chris Nahon (Le baiser mortel du dragon) avec certes les moyens financiers correspondants, la technique dernier cri, les images bien léchées et le casting de circonstance, mais pas l’ombre d’un vrai scénario qui tienne ses promesses, ni la prouesse d’acteurs qui se laissent aller à se singer eux-mêmes. D’ailleurs, Jean Reno, tête d’affiche obligatoire pour ce type de film d’action taillé sur mesure pour lui, ne change pas beaucoup de ses rôles habituels. En effet, en jouant continuellement le flic aux méthodes expéditives, grosse brute à la personnalité ambiguë qui s’en sort toujours vainqueur à la fin (malgré le fait qu’il soit ici moins taciturne et plus décontracté qu’à l’accoutumé), il n’a pas plus de 2 expressions faciales à son actif à force d’interpréter le personnage central, un gros bras redresseur de tort à la manière expéditive, mais avec toujours la même intonation et le même vocabulaire depuis Les visiteurs. Parti comme çà, il n’est pas près de se remettre un jour en question !
Quand aux autres (seconds) rôles, Arly Jover, la belle mystérieuse de rigueur qui a beau essayer de bien jouer mais qui n’arrive pas à nous en persuader une seule seconde, et (le regretté) Jocelyn Quivrin, un débutant à l'époque à la belle gueule d’étudiant mais pas crédible pour un sou en capitaine de la police, ils semblent sortir tout droit d’une école de comédiens, tant ils donnent l’impression de faire leurs premiers pas devant une caméra, hésitant par-ci, mal-à-l’aise par-là. Dire qu’ils sont pas mal, c’est déjà trop bien les noter ! Ce pari de prendre des inconnus en valait-il vraiment la peine et surtout le risque ? Seul le médecin légiste de la morgue, Philippe du Janerand, se retrouve régulièrement à la même place dans tout (bon) policier qui se respecte, habitué à endosser régulièrement le même rôle, celui du dépeceur de cadavres ou de croque-morts. Bref, pas de quoi pavoiser !
Chris Nahon s’est bel et bien fourvoyé dans un remake de Nikita (jeune tueuse à votre service !) sans intrigue, des Rivières pourpres (Jean Reno oblige !) avec incompréhension, le tout avec une poignée de plans imposants très publicitaires pour nous gâcher un peu plus le plaisir. Le seul (petit) talent qu’on puisse lui reconnaître, c’est qu’il filme particulièrement bien Paris, ses ambiances oppressantes dans des endroits souvent sordides et constamment sous la pluie, avec en prime son héroïne sous la douche, des ralentis en veux tu en voilà, des effets de cadrage qui en jettent, des décors complètement incroyables, le tout à grand renfort de situations invraisemblables et d’une bande son assourdissante qui nous empêche d’entendre la moitié de ce que dissent les acteurs.
Bref, rien de nouveau, de palpitant et de spectaculaire, rien qui puisse laisser croire à un énorme succès au final. Certes, il y a Jean Reno mais il n’arrivera pas tout seul à sauver cette entreprise plus ou moins bancale qui ne repose pas sur grand-chose, à part quelques scènes d’une violence inouïe. On ne peut pas dire que L’empire des loups brille par ses dialogues qui se résument à quelques explications vaseuses et à des clichés qui font plutôt rire qu’autre chose.
En résumé, on a un gros film sur les bras, moitié thriller, moitié policier, mal ficelé autour de manipulation sur le cerveau, de trafic de clandestins turques et de groupuscules politiques, qui risque fort bien de n’être qu’une pâle copie presque aussi conforme que celles que nous envoient régulièrement les américaines. Un conseil : s’abstenir, c’est encore la meilleure chose qu’il vous reste à faire si vous ne voulez pas perdre votre temps !

C.LB



 
 
 
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