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Gangs of New York (sur Ciné + Club)

Sortie  le  18/11/2021  

De Martin Scorsese avec Leonardo Di Caprio, Daniel Day-Lewis, Cameron Diaz, Liam Neeson, Jim Broadbent, Brendan Gleeson, John C.Reilly et Henri Thomas (sur Ciné + Club les 18, 19, 21, 23 et 26/11)


Au début des années 1860, les Etats-Unis sont au bord de la guerre de Sécession. A New York, la corruption a peu à peu gagné tous les dirigeants politiques. Five Points, l’un des quartiers les plus pauvres de la ville, est la proie de la guerre des gangs. Coincé entre le port, les rues prospères de Wall Street et Broadway, cet endroit de misère attire tous les criminels, toutes les activités illicites. C’est en ces temps de chaos qu’Amsterdam Vallon, un jeune immigrant irlando-américain, revient à Five Points après avoir purgé une peine de 15 ans de prison. Il n’a qu’un seul but : se venger de William Cutting, alias Bill le Boucher, le puissant chef de gang qui s’oppose farouchement aux immigrants et a tué son père. Pour accomplir sa vengeance, Amsterdam doit d’abord infiltrer le cercle des proches de Bill. Mais sa rencontre avec Jenny Everdeane, une énigmatique pickpocket dont l’indépendance et la beauté le fascinent, va tout compliquer. La quête d’Amsterdam évolue en un combat sans merci, pour survivre et conquérir une place pour les siens, alors qu’éclatent les émeutes sanglantes de 1863.

Un titre pareil sonne un peu comme celui du film Le parrain, une fresque exceptionnelle sur des évènements incroyables mais cette fois-ci autour d’émigrants irlandais, venus aux Etats-Unis peupler entre autre la ville de New York vers 1860. D’ailleurs, l'histoire de Gangs of New York ressemble de beaucoup à celle de ces italiens qui ont faits le même voyage et qui ont installés notamment la mafia en Amérique au début du Xxème siècle, cette fameuse Cosa Nostra si chère à leur pays et si bien décrite dans les 3 volets de la saga du Parrain.
Alors qu’on était en droit d’attendre de ce Gangs of New York le même cheminement narratif, la même intensité dramatique et le même style d’intrigue, on n’a qu'une suite de situations prévisibles d’avance : en ouverture, une gigantesque bagarre, un combat primitif, cruel et sans pitié, pour préciser qui est qui entre les gentils et les méchants, tous armés étrangement comme au moyen âge ; au milieu, un grand creux tour à tour romantique et dramatique qui dure tout de même 2h, une histoire individuelle tournant autour du thème classique de la vengeance et un sujet classique de jalousie entre 2 hommes vis à vis d’une femme ; et enfin, un début de bataille finale qu’on attendait depuis le début et qui est stoppée net dans son élan par les violentes et raciales émeutes qui clôturent le film. Quoi qu’il en soit, on attend qu’une chose d’Amsterdam pendant presque 2h50 (durée totale du film), c’est qu’il trucide une bonne fois pour toute celui qui a tué son père et qu’on passe à autre chose !
Voilà à peu près résumé l’ensemble de cette chronique, il faut bien le dire, d’une lenteur, d'une longueur et d’un ennui certains, le tout enrobé dans une reconstitution minutieuse et impressionnante de New York à l’époque. Le réalisateur Martin Scorsese, qui pourtant est un grand habitué des films violents et sanguinaires, notamment sur la ville de New York et ses occupants, surtout les gangsters italo-américains modernes dans Mean streets, Taxi driver, New York, Les affranchis, et dernièrement Casino, ne semble pas avoir été très inspiré par cette histoire à la fois de désespoir, de peur et de vengeance sur fond de gangs new-yorkais. Lui, qui n’a pas arrêté de raconter en long et en large la vie de ces immigrants italiens qui essayaient de se faire une petite place au soleil, s’est d'une certaine manière planté dans cette représentation de gangsters du XIXème siècle qui passent leur temps à se regarder de travers et à s’entretuer, à défaut d’autre chose. Et pourtant, il avait les moyens financiers et les vedettes adéquates pour représenter cette période haute en couleurs et en péripéties multiples et variées, et pour rendre palpitante et crédible cette partie de l'histoire des Etats-Unis. Pourquoi est-il allé copier quelques scènes de combats tirées du film Braveheart de Mel Gibson pour les mettre en scène dans ceux des rues de New York où les protagonistes sont armés et peinturlurés de la même manière que ces diables d’écossais contre les anglais ?
En fin de compte, on a tout de même la satisfaction d’apprendre et de découvrir quelque chose sur cette période de l’histoire de New York (que la plupart des gens ignorent sûrement), tout comme le plaisir de retrouver Daniel Day-Lewis qu’on avait pas revu depuis La chasse aux sorcières en 1996 et The boxer en 1997 (pour des raisons de santé, sans doute !), ainsi que Cameron Diaz, aussi sensuelle et provocante que garce et manipulatrice, qui sert ici un peu de répit au pauvre Amsterdam, alias Leonardo Di Caprio, qui n’en a pas beaucoup d’ailleurs dans l’environnement dans lequel il se trouve. En fin de compte, ce qui est drôle, c'est que Leonardo Di Caprio, qui doit porter pratiquement tout le film sur ses frêles épaules et son regard perçant, se retrouve encore une fois dans un rôle d’immigrant irlandais, exactement comme dans Titanic. D’autre part, la relation ambigu qu’il a avec Daniel Day-Lewis, son ennemi juré dans le film, est comparable à celle d’un père et d’un fils, alors que ce dernier a assassiné son père sous ses yeux lorsqu’il était tout jeune. Cette rencontre particulière, source de bouleversement et de désarroi chez Amsterdam, aurait pu être beaucoup plus forte et plus complexe que leur simple relation fondée sur une sorte de loyauté et de respect mutuel, d’autant plus que celle-ci est assombrie par la nature même de leur passé.
Après maintes réflexions, on comprend mieux pourquoi aucune major n’a achetée le film et pourquoi il sort en même temps aux Etats-Unis et en Europe. Même si Scorsese a été fasciné par ce moment critique de l’histoire américaine, une époque cruciale durant laquelle les principes de la démocratie américaine furent mis à l’épreuve, on aurait préféré un peu plus de puissance dramatique et de scènes d’action qui auraient ponctuées intelligemment les moments plus calmes et les parties plus dialoguées, ainsi qu’un montage plus serré, plus cut, qui nous aurait permit de rester plus concentré sur la narration et les faits au lieu de passer notre temps à regarder notre montre. Et même si les bas-fonds d’un New York authentique mais révolu, avec ses légendes et ses coutumes, sont dépeints avec autant de brio que de férocité grâce à des images plus vraies que nature, on n’en est pas moins désolé par tant de valeurs éthiques et de phrases clichés autour du sens et du code de l’honneur, mis en exergue au moins toutes les 5 minutes.
Enfin, même s’il dresse le portrait sauvage d’un pays qui découvrait, pour la première fois, le pouvoir de ceux de la rue, on est surpris par tant de pellicules gâchées avec cette nouvelle manie qu’on les réalisateurs américains de faire des films de plus en plus longs (voire Harry Potter, Star Wars, etc…) comme s’ils voulaient rentrer dans le Guiness des records. Bref, un bel exercice de style, techniquement et magistralement flamboyant, mais peu enclin à espérer recevoir un quelconque Oscar en début d’année 2003, sauf peut-être pour les remarquables décors et effets spéciaux qui recréent l’ambiance et restituent l’atmosphère de l’époque avec précision et poésie !

C.LB



 
 
 
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