en France%20enti%EF%BF%BD%EF%BF%BDre
 
 
cinema

 
 

Minority report (sur Ciné + Frisson)

Sortie  le  29/07/2023  

De Steven Spielberg avec Tom Cruise, Colin Farrell, Samantha Morton et Max Von Sydow


Washington, 2054. La société du futur a éliminé le meurtre en se dotant du système de prévention/détection/répression le plus sophistiqué du monde. Dissimulés au cœur du Minisyère de la Justice, 3 extra-lucides captent les signes précurseurs des violences homicides et en adressent les images à leur contrôleur, John Anderton, chef de la Précrime. Muni de toutes les informations nécessaires sur les circonstances du forfait potentiel, celui-ci n’a plus qu’à lancer son escouade aux trousses du coupable. Devenu justicier après la disparition tragique de son fils, Anderton s’est investi avec passion dans sa tâche, convaincu que la Précrime serait le meilleur remède à sa douleur et la réponse la plus adaptée aux obsessions sécuritaires de ses concitoyens. 6 ans ont passé et il est plus certain que jamais de la validité de ce système miracle que le gouvernement se propose d’appliquer à l’échelle nationale. C’est alors que se produit l’impensable : l’ordinateur lui renvoie sa propre image. D’ici 36 heures, Anderton aura assassiné un parfait étranger. Devenu la cible de ses propres troupes, Anderton prend la fuite. Son seul espoir pour déjouer le complot : dénicher sa future victime. Sa seule arme : les visions parcellaires, énigmatiques, de la plus fragile des Pré-Cogs, Agatha. En passant de l’autre côté de la barrière, en plongeant dans le monde obscur de la cité, Anderton découvre du même coup les aberrations maléfiques, les failles par trop humaines du système qu’il a contribué à bâtir. Et comprend qu’il lui faudra, pour rester en vie, opérer des choix radicaux et sacrifier ce qui lui était le plus précieux…

Un petit voyage dans la science-fiction et le futur n’a jamais fait de mal à personne et encore moins à nos mirettes et nos neurones ! Et comme le réalisateur Steven Spielberg aime bien lui aussi ce style de ballades (E.T., Rencontres du 3ème type, La quatrième dimension, Intelligence artificielle), raison de plus pour ne pas en profiter un peu à l’occasion. Autant vous le dire tout de suite, il y a dans cette nouvelle production aussi bien des bonnes choses que des mauvaises, et nous allons vous les énumérer comme il se doit.
Commençons par le meilleur : le scénario est vraiment original et l’histoire tient bien la route, au point d’être rapidement émerveillé par son contenu visionnaire. Par rapport à Intelligence artificielle, écrit par feu le génial Stanley Kubrick mais massacré par Spielberg, il s’en est bien sorti cette fois-ci ! Basé sur une nouvelle de Philip K. Dick (souvenez-vous de Blade runner !), ce film noir complexe, doublé d’une sorte de thriller psychologique mystérieux et énigmatique, sort des sentiers battus et offre aux spectateurs une vision futuriste par petites touches tout à fait crédibles et inattendues de ce que sera notre proche avenir. Il faut se rendre à l’évidence : les effets spéciaux et visuels, comme les amples décors urbains, et les nombreuses idées, censées représenter notre société de consommation de demain, sont plutôt réussis. En effet, il faut voir avec quelle jubilation, Spielberg a pimenté sa réalisation d’une grande extension du monde actuel, avec des voitures magnétiques et autoguidées sur des autoroutes aussi bien horizontales que verticales, des écrans vidéos segmentés où l’on peut choisir et extraire les séquences ou les images voulues, des intérieurs high-tech new-look avec tous les gadgets qui s’y rapportent, une prison révolutionnaire où les assassins sont confinés dans des tubes pneumatiques, des publicités virtuelles qui s’adressent directement aux consommateurs par leur nom, et des journaux papiers holographiques où les nouvelles apparaissent au fur et à mesure que l’actualité se développe. Il est vrai que ses prouesses techniques et ses éléments organiques ne manquent pas d’excentricité et donnent une image réelle de ce qui nous attend dans quelques années.
On aurait pu craindre ici quelques réminiscences d’Intelligence artificielle, mais heureusement, il n’en est rien, sauf peut-être certains trucages comme les flics volants qui sont belle et bien suspendus à des filins (et ça se voit car cela manque de naturel !). A part cela, nous sommes plongé dans une aventure hallucinante, à la fois palpitante et machiavélique, qui nous entraîne dans une folle et cauchemardesque course-poursuite contre la montre où le héros principal, traqué pour un meurtre qu’il n’a pas encore commis, doit se disculper avant que le méfait ne se produise. C’est Tom Cruise qui s’y colle en pauvre policier innocent qui veut sauver sa peau du traquenard dans lequel on l’a foutu. Avec son nom en tête d’affiche, c’est un peu comme si Spielberg avait réalisé Mission Impossible 3 ! D’ailleurs, on retrouve dans Minority report, où Tom Cruise porte son éternel tee-shirt noir de circonstance, exactement les mêmes situations, les mêmes périples et les mêmes combats, les ralentis en moins. Qu’importe, l’histoire est enrichie de personnages secondaires charismatiques, dont certains ont même des pouvoirs de médium qui leurs permettent de voir des crimes potentiels de sang qui doivent se produire dans les prochaines heures. Alors, ça change tout !
Ceux qui tirent leur épingle du jeu sont essentiellement Colin Farrell (The war zone, Ordinary decent criminal, Tigerland, Mission évasion) en expert dévot et fouille-merde assermenté (qui au départ devait être joué par Matt Damon), Samantha Morton (Accords et désaccords, Under the skin, Jesus’son) en voyante extra-lucide qui barbote dans un liquide fœtal, et Max Von Sydow (L’exorciste, Les 3 jours du condor, Jamais plus jamais, Dune, Hannah et ses sœurs, Pelle le Conquérant, Jusqu’au bout du monde, Europa, Les meilleurs intentions, Au-delà de nos rêves) en super-boss manipulateur et protecteur ambigu. Ce qui peut gêner en réalité, c’est le fait que Steven Spielberg veut absolument satisfaire son public et il en rajoute ici et là d’une manière soit excessive, soit trop explicite. Il souligne trop les détails, s’éternise sur des clichés, arrondit les angles et explique les intrigues le plus souvent possible pour mieux faire comprendre aux américains de quoi il en retourne. C’est comme s’il s’adressait uniquement à des enfants !
On en veut à Spielberg d’avoir dépeint ce futur aseptisé en se laissant embarqué dans une certaine facilité au lieu de laisser réfléchir le spectateur, et d’avoir inclus des situations à la limite du grotesque pour soi-disant pimenter ses films (l’échappée des yeux de Tom Cruise, ses globules ensanglantés roulant dans l’enceinte du Ministère de la Justice, son visage déformé comme celui qu’il arbore dans le film Vanilla sky). C’est comme cette opération rétinienne qui est aussi farfelue que de voir quelqu’un, à qui l’on vient de greffer des ailes, voler dans les airs. Et puis, public U.S. oblige, il ne pouvait pas finir son film sans un heureux happy end à l’américaine, traditionnel et même obligatoire, la femme de Tom Cruise de nouveau enceinte après qu’ils aient perdu leur fils il y a 6 ans, pour dire que la boucle est bouclée et que tout est enfin rentré dans l’ordre.
En fait, Spielberg n’est plus l’innovateur qu’on aimait tant et Tom Cruise, plus l’acteur surprenant qui nous impressionnait. Il nous reste juste de quoi nous divertir (tout de même 2h25 !) en nous rabattant sur quelques bonnes astuces cinématographiques originales qui ne duperont bientôt plus personne, d’ici peut-être une petite dizaine d’années. Le gros problème du cinéma actuellement, c’est que des scénarios palpitants, il n’y en pas tant que cela, et si Mr. Spielberg s’amuse à les adapter, à grands renforts de pouvoir (propriétaire du studio Dreamworks qui produit ce film), moyennant un budget adéquate et un savoir-faire déjà reconnu, on va avoir à un moment ou à un autre des remontrances à lui faire, comme on le fait depuis quelques temps à notre Spielberg français, Luc Besson !

C.LB



 
 
 
                                                      cinema - theatre - musique