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- BD : Blake et Mortimer – tome 27 : Le cri du Moloch de Jean Dufaux (dessin de Christian Cailleaux et Etienne Schréder) aux éditions Dargaud

Sortie  le  20/11/2020  

De Jean Dufaux avec 56 pages


Une nouvelle enquête du duo des deux héros So British, imaginés par Edgar P. Jacobs à travers l’une des plus célèbres sagas de la bande dessinée franco-belge, sur les traces d'Olrik, leur pire ennemi ainsi que celui de la couronne d'Angleterre.

By Jove ! Grâce à son « sacrifice » lors de la destruction d’un engin extraterrestre enfoui sous la capitale anglaise, Olrik est toujours hospitalisé et interné au Bedham Hospice, un asile psychiatrique. Le professeur Philip Mortimer envisage de tirer de son aphasie son vieil adversaire en utilisant la magie de la célèbre formule du cheik Abdel Razek du «Mystère de la grande pyramide » (« Par Horus, demeure ! »), afin de créer un choc salutaire dans son cerveau complètement perdu. En effet, il a besoin de lui pour percer le mystère d’un 2ème vaisseau, Orpheus VII, et de son pilote encore vivant, que les scientifiques ont baptisé « le Moloch », d’un nom d’une divinité biblique.

Cet alien à forme humaine, à l’allure sombre, menaçante et hiératique, est capable de s’approprier le corps d’un autre – notamment celui de ses adversaires - afin de dissimuler sa véritable identité. Le jour où le Moloch s’échappe du laboratoire secret dissimulé à bord d’un cargo dans lequel il était retenu prisonnier, Londres est en danger et doit craindre le pire, tout autant que le reste du monde d’ailleurs. Bientôt, d’étranges caractères cabalistiques, qui sont autant de messages indéchiffrables, recouvrent les murs et façades de la cité. Seul le « colonel » Olrik semble capable d’aider à les déchiffrer...

7 ans après la parution de L’onde Septimus, nous retrouvons les différents personnages de cette histoire dans Le cri du Moloch. Le scénariste Jean Dufaux continue, sous forme d’hommage non déguisé, à revisiter l’esprit et la fantasmagorie « jacobsienne » du fameux La marque jaune, l’un des plus importants albums d’Edgar P. Jacobs, et cela toujours à grands coups de démesure scientifique, de science-fiction, d’aventure palpitante et de folie.
Succédant à Antoine Aubin, Christian Cailleaux et Etienne Schréder (ce dernier ayant déjà participé à La Malédiction des trente deniers, L’onde Septimus et Le bâton de Plutarque) égrènent également dans cette suite de 56 pages, les hommages graphiques au chef-d’œuvre absolu d’Edgar P. Jacobs, grâce à une ligne claire d’un classicisme affiché sur fond de traits racés, précis et élégants, aussi dépouillés qu’évocateurs. Ils restituent ainsi, avec une fidélité minutieuse, l’atmosphère éternelle de Londres des années 1950, notamment ses docks froids, ses bâtiments en brique rouge, son épais brouillard, jusqu’à même la présence de la jeune reine d’Angleterre, Elizabeth II.
Le scénario à la fois habile, implacable et très cinématographique de Dufaux se livre à une mise en abyme fascinante du personnage d’Olrik qui va jouer ici un rôle central, non plus en tant qu’ennemi mais plutôt allié cette fois. Cette figure mythique de la bande dessinée belge, aussi distinguée qu’inquiétante, oscille entre un héroïsme inattendu et plein de panache, et ces bas instincts qui constituent son ADN personnel plutôt cynique et trouble. Quant à Laurence Croix, le coloriste, elle restitue avec brio la palette de couleurs expressionnistes qui étaient la marque (et pas seulement jaune) de l’hebdomadaire Tintin dans lequel était publié Jacobs.

-Les auteurs :
*Jean Dufaux est l'auteur d’une œuvre importante comprenant près de 200 titres, une œuvre originale, à l'écart des modes, plus complexe qu'il n'y paraît : "Complainte des landes perdues, Double masque, Murena, Rapaces, Djinn, Croisades, Barracuda, Sortilèges, Loup de Pluie, Le Bois des vierges, Conquistador, ..." Le monde de Jean Dufaux s'orchestre autour de quelques thèmes récurrents qui structurent ses récits : le pouvoir et la folie, la solitude et ses miroirs, les égarements du temps, les blessures du passé. Cette mosaïque immense qui ne refuse ni les jubilations du roman-feuilleton ni les ellipses cinématographiques se veut avant tout une œuvre de plaisir, d'enchantement, au sens féerique et occulte du terme. Ces albums, vendus à des millions d'exemplaires, couronnés par de nombreux prix et récompenses, diffusés dans une douzaine de pays (Europe, Japon, Etats-Unis), elle déploient leurs charmes, se parant du graphisme des meilleurs européens et s'appuyant un art du dialogue qui épouse et repousse l'image dans un même mouvement. Parmi les nombreux prix, dont certains pour son œuvre complète, qui qu'a reçus Jean Dufaux, citons : Le prix Calibre 38, (prix du meilleur polar) pour HAMMETT, aux éditions Glénat, en 1996. Le prix de la Société des gens de lettres pour MURENA, aux éditions Dargaud, en 2007. Le prix Cheverny (meilleur roman graphique "Histoire") pour MURENA en 2011. Jean Dufaux est, par ailleurs, président du jury des prix Diagonale qui, en Belgique, récompensent chaque année des artistes de la bande dessinée. En 2009, son œuvre est exposée lors des « Regards croisés de la bande dessinée belge » dans les musées royaux des Beaux-Arts de Belgique. Jean Dufaux a été nommé chevalier de l'ordre des Arts et des Lettres en 2009. En 2016, le duo Dufaux/Jamar revient avec un one shot historique, « Vincent » (Éditions Dargaud) qui nous plonge au cœur de Paris du XVIIe siècle, dans le quotidien de Vincent de Paul, un homme d'Église dévoué, en quête de vérité. 2016 marquera aussi de la fin de deux aventures : celle « Djinn », puisque la série qu'il a créée en binôme avec la talentueuse Ana Miralles s'achèvera avec la sortie du tome 13, et celle de « Barracuda », qui après 6 tomes s'en ira voguer sur d'autres flots.

*Christian Cailleaux naît en 1967 à La Garenne-Colombes, en banlieue parisienne. Est-ce là qu'il attrape le virus du dessin ? Mystère. Car lui prétend ne l'avoir jamais contracté, se considérant comme un artiste laborieux bien moins habile que tant d'autres... Ce qui est par contre certain, c'est que Cailleaux contracte tôt le goût des histoires et des voyages... Après des études de Lettres/Philo, puis un passage par l'École Nationale d'Art de Cergy, il part donc étancher sa soif d'ailleurs à travers le monde. A 20 ans, grâce à son service militaire, Cailleaux part en compagnie de Céline et Conrad le long du fleuve Congo. Il se met ensuite en quête de Rimbaud ou St Exupéry dans les sables. Puis de Corto ou Loti dans les ports. Il vit ainsi durant quinze ans entre l'Afrique, le Québec et la France, animant des ateliers de dessin dans les Centres Culturels ou les Alliances Françaises d'une quinzaine de pays du continent. Christian Cailleaux, déjà reconnu comme un dessinateur extrêmement talentueux, explique pourtant n'avoir qu'un don : celui de faire croire aux diplomates français qu'il diffusera avec brio ses lumières auprès des populations autochtones ! Un don qui lui permet aussi de faire croire aux éditeurs que la description de ses pérégrinations indolentes sera d'un fol exotisme. Après avoir publié les aventures d'"Arthur Blanc-Nègre" (Dargaud, sur un scénario de Sallé, aujourd'hui épuisé), Christian Cailleaux s'invente un double de papier - Félix Mogo ? grâce auquel il raconte ses bonheurs d'ailleurs et les rencontres improbables des promeneurs qui gardent le nez au vent. Ses premiers albums en solo, très remarqués, s'intitulent "Haëllifa" (Dargaud - 1997), "Harmattan le vent des fous" (1998), "Le café du voyageur" (2000), "Le troisième thé" (2002) ou "Tchaï masala" (2007), parus chez Treize Étrange. Tous ont en commun de développer un dessin au style unique, que sa remarquable puissance d'évocation rend immédiatement séduisant. Chez Cailleaux, un simple trait devient ligne d'horizon romantique. Chez Cailleaux, le silence d'un personnage peut être plus parlant qu'une pleine bulle. Christian Cailleaux démarre ensuite la trilogie "Les Imposteurs" (Casterman, entre 2003 et 2005), narrant les tribulations amoureuses et filoutes d'un piètre trompettiste (comme lui). Avide de mers et de lointains, Christian Cailleaux s'embarque alors - au propre comme au figuré - sur les bâtiments gris de la Royale avec celui qui deviendra son ami, le comédien-écrivain Bernard Giraudeau, pour l'album R97, les hommes à terre (Casterman, 2008). Puis il entre dans la prestigieuse collection Aire Libre des Éditions Dupuis pour évoquer Boris Vian en dessinant "Piscine Molitor" (2009) avec son ami et scénariste Hervé Bourhis. C'est dans cette même collection qu'il poursuit sa collaboration avec le regretté Bernard Giraudeau en publiant en 2011 Les Longues Traversées. En 2013, Christian Cailleaux aborde la BD-Reportage en racontant son embarquement vers les Terres Australes avec "Marins d'eaux dures", publié dans le N°1 de La revue dessinée, puis intégré à l'album "Embarqué", paru en mai 2015 aux éditions Futuropolis. Début 2017 paraît chez Dupuis une biographie de Jacques Prévert conçue avec Hervé Bourhis : "Jacques Prévert n'est pas un poète". Timothée de Fombelle lui offre ensuite "Gramercy Park", un magnifique mélo survolant les toits de l'Opéra de Paris jusqu'aux buildings New Yorkais. Christian Cailleaux reprend ensuite la mer à bord de la goélette scientifique Tara. Une expédition qu'il narre dans "Cahiers de la Mer de Chine", chez Dupuis/Aire Libre, en 2018. En plus de tous ces albums, Christian Cailleaux réalise des couvertures de romans ("Cher amour", de Bernard Giraudeau), des récits jeunesse ("Frankenstein" pour Albin Michel Jeunesse, sur une adaptation de Michel Piquemal) ou des pochettes de disque de jazz ("Piano solo"). Reconnaissable entre mille grâce à son trait évocateur et charnel, Christian Cailleaux possède la modestie de ceux qui se sont confrontés à la différence dans leurs voyages. Infatigable découvreur d'ailleurs, son dessin est une invitation au départ immédiat pour des contrées séduisantes et mystérieuses, d'où la culture n'est jamais absente. Pratt et Conrad peuvent dormir tranquilles : la relève est là.

*Étienne Schréder est né en 1950 à Anderlecht (Belgique). Il suit une formation de criminologue et travaille pendant cinq ans dans le milieu pénitentiaire. Contraint de quitter son travail en raison d'une dépendance à l'alcool, il mène une vie de vagabondage qu'il racontera dans deux bandes dessinées publiées chez Casterman, La Couronne en papier doré et Amères Saisons. Il publie ses premières bandes dessinées en 1989 dans le mensuel (À suivre) puis décide l'année suivante de se consacrer à plein temps au dessin. Auteur d'une œuvre personnelle, Étienne Schréder est aussi le « collaborateur graphique » de plusieurs albums, notamment Souvenirs de l'éternel présent de François Schuiten et Benoît Peeters. Quand il n'est pas installé devant sa table à dessin, il aime jouer de la guitare. Il est aussi le responsable, avec Schuiten et Peeters, de la Maison Autrique située à Bruxelles, le premier édifice construit par l'architecte Victor Horta.



 
 
 
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