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Antigone

Sortie  le  24/06/2020  

De Sophie Deraspe avec Nahéma Ricci, Hakim Brahimi, Rawad El-Zein, Paul Doucet, Antoine Desrochers, Nour Belkhiria et Rachida Oussaada


Antigone est une adolescente brillante au parcours sans accroc. En aidant son frère à s'évader de prison, elle agit au nom de sa propre justice, celle de l'amour et la solidarité.
Désormais en marge de la loi des hommes, Antigone devient l'héroïne de toute une génération et pour les autorités, le symbole d'une rébellion à canaliser…


Le titre de ce film aurait-il un rapport direct autant avec le chef-d’œuvre classique et éponyme de Sophocle, se déroulant en pleine mythologie grecque, qu’avec l’une des nombreuses et célèbres pièces écrite par Jean Anouilh et jouée pour la première fois au théâtre de l’Atelier en 1944 ? Oui, un peu des 2 de par le simple fait que ce long métrage s’inspire du mythe antique d’Antigone (la fille d’Œdipe) mais cette fois de façon libre et contemporaine, à travers un scénario baigné dans un contexte complètement actuel, en rupture avec les codes de la tragédie grecque traditionnelle. Néanmoins, tous les noms des protagonistes ont été gardés (Etéocle, Polynice, Ismène, Hémon...) et cela fait un drôle d’effet lorsque chacun d’entre eux parle avec l’accent québécois plus ou moins prononcé !
C’est un drame autour d’une variante du pouvoir, de l’(in)justice et de la révolte auquel nous sommes conviés ici, celui d’une jeune fille de 16 ans éprise de « solidarité envers sa famille kabyle », collégienne sans problème et cadette d’une fratrie d’immigrants (sans père ni mère mais heureuse avec une grand-mère tutrice appelée Ménécée) qui se dresse contre des forces qui la dépassent, prête à tout à défendre bec et ongles l’un ou l’autre des siens quelques soient les circonstances passées (en prenant sa place en prison, elle a permis à l’un de ses frères d’être en cavale) et les peines encourues (accusé de supposition de personne, incapacité d’obtenir un jour la nationalité québécoise, « déportée » ou plutôt rapatriée dans son pays d’origine), quitte pour cela à se sacrifier elle-même, c’est-à-dire à perdre sa liberté et son avenir.
« Son cœur lui di(c)t(e) » quoi faire et c’est parti pour son « code de vie » derrière les barreaux, son existence lors d’un long séjour en détention et son combat presque mutique face au monde des adultes qui l’entoure et dans lequel elle ne se reconnaît pas. Elle, c’est Nahéma Ricci, une révélation canadienne au regard prenant et aux expressions touchantes. Elle porte littéralement cette histoire grâce à l’intensité de son jeu qui nous fait penser à une véritable tragédienne des temps modernes (elle a d’ailleurs reçu, pour cette interprétation, le prix de la meilleure actrice au 8ème Ecrans Canadiens). Le reste du casting n’est pas en reste non plus, l’occasion de retrouver notamment Antoine Desrochers, déjà présent dans la production québécoise Jeune Juliette, sorti récemment sur nos écrans.
On ne peut que féliciter la réalisatrice Sophie Deraspe (elle est l’une des figures remarquées du nouveau cinéma québécois : Rechercher Victor Pellerin ; Les signes vitaux ; Les loups ; Le profil Amina) qui a su parfaitement tirer et maîtriser toutes les cordes de cette jeunesse en quête de repères, de choix et de limites...

C.LB



 
 
 
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