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Un soir en Toscane

Sortie  le  05/02/2020  

De Jacek Borcuch avec Krystyna Janda, Vincent Riotta, Antonio Catania, Kasia Smutniak, Robin Renucci, Mila Borcuch, Lorenzo de Moor et Arjun Talwar


Maria Linde, poétesse et prix Nobel juive polonaise, s’est retirée loin des mondanités et des conventions dans la paisible campagne de Toscane. Elle y vit libre et heureuse, entourée de sa famille, de ses amis et de son jeune amant égyptien. Mais la tension monte dans la vieille Europe comme dans sa petite ville où les réfugiés affluent. Refusant l'hypocrisie ambiante, Maria accepte une ultime remise de prix, et revient dans l'espace public avec une déclaration qui fait scandale.

Il est assez surprenant qu’un réalisateur, scénariste et également acteur, de surcroît polonais, Jacek Borcuch (Kallafior ; All that I love ; Lasting), ait eu envie de tourner son 5ème film en Italie et quasiment dialogué que dans cette belle langue aussi excessive qu’emportée, aussi nerveuse qu’imagée. Grand bien lui en a pris puisqu’il nous offre une peinture plutôt assez réaliste de cette « intelligencia », tout pays ou origine confondu, sous les traits d’une femme âgée qui se permet tout, de vivre comme bon lui semble, agissant à sa guise et de son propre chef sans se soucier des autres comme si elle était bien au-dessus des lois et de tout le monde, disant ce qui lui chante quitte à provoquer le rejet de tous et le chaos au sein même de sa propre famille, bref, la représentation d’une certaine forme d’état d’esprit très indépendant, notamment ici culturel et artistique (elle est lauréate d’un Prix Nobel), qui n’en fait qu’à sa tête et tant pis si cela peut avoir des répercussions néfastes sur ses proches !
Pour jouer ce personnage « hors normes » et tout en démesure (elle boit, fume, emploie un discours immoral et ne respecte pas le code de la route !), il a fait appel à la fameuse actrice polonaise Krystyna Janda (L’homme de marbre ; L’homme de fer ; Espion, lève-toi ! ; L’interrogatoire – long métrage pour lequel elle a obtenu le prix d’interprétation féminine à Cannes en 1990 - ; Vertiges ; Tu ne tueras point ; Un air si pur...), menant à l’écran une vie plutôt oisive, refusant de céder à une quelconque pression environnante (entre autres celle de l'horreur du terrorisme qui provoque la montée des extrêmes et la suspicion des élites) et maniant parfaitement 3 langues (dont le français) lorsque son interlocuteur viendrait à lui parler différemment.
Elle arrive presque à vampiriser tout le reste du casting, qu’il soit italien (Antonio Catania), polonais (Kasia Smutniak – vue notamment dans From Paris with love, Le quatrième pouvoir et Contes italiens) ; danois (Lorenzo de Moor) ; Arjun Talwar ; Mila Borcuch – la propre fille du cinéaste -), français (Robin Renucci) ou bien encore anglais (Vincent Riotta). Magistrale en Mamie insouciante qui fait de la résistance autant à la vieillesse (elle entretient une relation adultérine avec un immigrant bien plus jeune qu’elle) qu’à l’ordre établi (ayant été confrontée aux préjugés et à l'antisémitisme tout au long de sa vie, elle refuse de céder à la pression et continue de s'ériger en faveur de la liberté de pensée), elle représente à l’image – et à merveille - « une métaphore de l'Europe qui lentement se fissure et se disloque » à coup de propos indignes de sa personnalité.
Parfaitement filmé (quels beaux paysages et puis quelle belle maison !) et baigné d’une BO tantôt italienne, tantôt électro et tantôt Frank « Sinatrienne », ce long métrage nous permet de nous réconcilier avec ces coproductions européennes qui savent souvent mettre en avant les particularités et autres singularités propres à chaque contrée, aussi différentes voire opposées soient-elles...

C.LB



 
 
 
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