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Les moissonneurs

Sortie  le  20/02/2019  

De Etienne Kallos avec Brent Vermeulen, Alex van Dyk, Juliana Venter, Morne Visser, Lily Bertish et Jan-Daniel Naude


Afrique du Sud, Free State, bastion d’une communauté blanche isolée, les Afrikaners. Dans ce monde rural et conservateur où la force et la masculinité sont les maîtres-mots, Janno est un garçon à part, frêle et réservé. Un jour, sa mère, fervente chrétienne, ramène chez eux Pieter, un orphelin des rues qu'elle a décidé de sauver, et demande à Janno de l'accepter comme un frère. Les deux garçons engagent une lutte pour le pouvoir, l'héritage et l'amour parental.

Avant toute chose, il faut savoir que les afrikaners sont des « africains » blancs d’Afrique du Sud, soit d’origine néerlandaise, française, allemande ou bien scandinave, qui s’expriment dans une langue maternelle dérivée du néerlandais du XVIIème siècle, l’afrikaans. On peut aussi les désigner par le terme « hollandais du cap » qui est plus précis que le terme afrikaner. Ainsi expliqué, on peut mieux comprendre ce « drôle » de dialecte accentué que tous les protagonistes emploient. Passé ce constat, on découvre une famille de fermiers très croyants, vivant à la dure entre bétail et récolte, la foi bien chevillée au corps et surtout à l’esprit (ça prie tout le temps, ça récite des « Notre père » à tout bout de champs – puisqu’il y en a plusieurs à perte de vue ! -, ça lit que des livres religieux et ça se pose des tas d’interrogations existentielles comme par exemple « est-ce que Dieu existe ?), le tout dans un endroit profondément isolé, un trou perdu on ne peut plus paumé et hostile, très loin de toute grande agglomération.
Et voilà que justement débarque d’une ville un « péril en la demeure », un jeune garçon « en manque », aussi douteux que débauché et aussi sournois que pervers, qu’une maman dévote (elle s’appelle Marie : c’est vous dire !) a décidé de sauver et d’élever telle une épreuve envoyée de là-haut (afin de l’aider à se reconstruire et à revenir sur le droit chemin pour « ne pas avoir çà sur la conscience le jour du jugement dernier ! »), qui va déclencher une sorte de zizanie au sein de cette fratrie déjà importante (composée de 3 sœurs et d’un frère), suivie d’une espèce de remise en question de ses fondements identitaires auprès de ce dernier, du même âge que le nouvel arrivant. S’en suit alors une concurrence, un rapport de force entre les 2 ados, l’un égoïste, ayant du mal à se confronter à la vie réelle, et l’autre bagarreur et « mort de l’intérieur », rivalisant d’ingéniosité comme de roublardise pour tenter de le déniaiser un peu et lui faire ouvrir les yeux sur une certaine réalité ambiante.
Il va s’en dire que pour eux-deux, la cohésion, mise à dure épreuve, ne se passera pas sans heurts ni pleurs et encore moins de mensonge, avec pour l’adopté, un court séjour en prison puis chez les scouts, et pour le fils aîné, un grand besoin de reconnaissance auprès de tous, découvrant en même temps un monde qu’il ne connaît pas (encore), partagé entre un grand-père aussi sénile que méchant, une mère aux vœux exclusivement pieux et la pérennité de leur ferme. Le réalisateur et scénariste Etienne Kallos (que 2 court-métrages à son actif, Doorman et Firstborn) nous propose un drame sensible qui s’attache autant aux problèmes religieux qu’identitaires, autant politiques que sexuels, dans l’Afrique du Sud d’aujourd’hui, le tout sur fond d’une représentation et d’une exploration d’une communauté sud-africaine bien distincte, peu voire presque jamais montrée au cinéma (à part The wooden camera de Ntshaveni Waluruli en 2003, Beauty d’Olivier Hermanus en 2011 et, dernièrement, Forgiven de Roland Joffé)....

C.LB



 
 
 
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