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Une pluie sans fin

Sortie  le  25/07/2018  

De Dong Yue avec Yihong Duan, Yiyan Jiang, Yuan Du, Zheng Wei, Chuyi Zheng, Zhang Lin et Tao Liu


1997, à quelques mois de la rétrocession de Hong-Kong, la Chine va vivre de grands changements...
Yu Guowei, le chef de la sécurité d’une vieille usine, dans le Sud du pays, enquête sur une série de meurtres commis sur des jeunes femmes.
Alors que la police piétine, cette enquête va très vite devenir une véritable obsession pour Yu... puis sa raison de vivre.


Ce n’est pas tous les jours que nous avons la possibilité de voir un film chinois qui sort un peu de ses éternels sentiers battus, que ce soient des fresques plus ou moins historiques, des légendes de dragons, ou bien des combats au kung-fu et autres arts martiaux ! Ici, nous avons à faire à un film bien noir, une sorte de thriller oppressant, à l’ambiance sombre et à l’atmosphère humide, battue par une pluie diluvienne sans discontinuée (de quoi devenir fou !), omniprésente pendant les 2 heures de ce long métrage étouffant, le tout sur fond de crimes sordides et d’usines étatiques en voie d’extinction, dans un pays en fin de règne « populaire » pour ne pas dire communiste.
Il y a là, plongé en pleine transition politique et réformes économiques, autant de soumission que de corruption, autant de personnages serviables à souhait (notre « héros », employé modèle et « détective » dévoué à ses heures qui aimerait bien devenir policier, flanqué de son brave et fidèle « adjoint » très souvent « attaché » à ses basques) que d’autres plutôt blasés (le capitaine de police taciturne et déphasé, travaillant dans un commissariat particulièrement pourri), paumés (la petite amie bienveillante qui rêve d’ailleurs, d’autre chose) et énervés (les flics toujours prêts à rabaisser, gifler ou rosser l’un de leurs concitoyens pour le bien de leur statut). C’est que, dans toute production de ce type dit « social », il existe des poncifs hiérarchiques à respecter pour que chacun reste à sa place, afin d’éviter ou, du moins, d’empêcher que l’un(e) d’entre eux (elles) ait quelques velléités « promotionnelles ».
Autre caractéristique non négligeable, c’est le décor représenté, une infrastructure de hauts fourneaux aussi gigantesques qu’hallucinants, à la fois mornes, déserts et tristes, qui semblent presque vampiriser l’histoire, toujours balayés par des trombes d’eau et néanmoins servant souvent de cadres à des meurtres crapuleux ou de théâtres à des scènes de crimes avec toujours le même mode opératoire. La clope perpétuellement collée au bec, Yu Guowei (interprété par Yihong Duan, vu notamment dans Une jeunesse chinoise, Wind blast, La plaine du cerf blanc, et The dead end) va mener sa propre enquête jusqu’à en devenir une véritable obsession. Il y a de l’angoisse, de la paranoïa et de la schizophrénie dans l’air, au point d’avoir parfois du mal à trouver une corrélation tangible, voire explicite entre l’investigation policière entreprise et les fêlures des protagonistes principaux apparentes.
Quoi qu’il en soit, c’est tellement rare de pouvoir admirer une mise en scène et un script pareils (ceux de Dong Yue, chef opérateur pour de nombreux films de fiction, puis réalisateur dans la publicité), de ce genre (la fin d’une époque en plein changement) et de cette trempe (c’est son tout 1er long métrage), qu’il ne faut en aucun cas louper l’occasion d’aller le voir....

C.LB



 
 
 
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