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Les affamés

Sortie  le  27/06/2018  

De Léa Frédeval avec Louane Emera, François Deblock, Marc Jarousseau, Nina Mélo, Rabah Naït Oufella, Bruno Sanches et Souheila Yacoub


Zoé a 21 ans. Et Zoé en a sa claque d'entendre « c'est normal, t'es jeune ! ». Alors qu’elle emménage en colocation, elle prend conscience qu’elle n’est pas seule à se débattre entre cours, stages et petits boulots mal payés. Déterminée à bouleverser le complot qui se trame, elle unit autour d'elle une génération d'affamés. Ensemble, ils sont bien décidés à changer les choses et à faire entendre leur voix !

Zoé est interprétée par Louane Emera, égérie musicale des parents mais surtout des enfants côté chanson de variété hexagonale – elle a été remarquée dans l’émission de télé-crochet The Voice en 2014, puis récompensée dans la catégorie Victoire de l’album révélation de l’année en 2015 pour son 1er album Chambre 12 -. Et c’est aussi une actrice montante (Nos patriotes) surtout grâce à son rôle marquant dans La famille Bélier qui lui valut d’ailleurs le César du meilleur espoir féminin en 2015. Alors, quand elle apparaît dans un nouveau film, on ne peut que penser au succès fulgurant de cette femme de 21 ans qui incarne une certaine image - et une idée certaine – du « bel âge » français actuel.
Fort est de constater qu’ici, elle est pratiquement omniprésente à l’écran, à plus forte raison qu’elle y est pendant 1h35, endossant le rôle d’étudiante le matin, de stagiaire l’après-midi et de vendeuse le soir, au point de vampiriser la plupart des autres protagonistes par son caractère bien (dé)trempée de rebelle en herbe, le tout dans cette espèce de huis-clos – la quasi intégralité de l’histoire se déroule dans un appartement parisien – qui essaye tant bien que mal de démontrer que « les jeunes font tourner le système » et qu’il faut que cela soit dit haut et fort tout en étant reconnu et valorisé à sa juste valeur, au lieu de « se faire niquer par lui (le système) » et n’avoir aucune perspective d’avenir.
Malgré sa présence-caution, cette nouvelle version de « L’auberge espagnole » ne va malheureusement pas révolutionner le genre par manque - « grave, grave ! » - de rythme, de suspense et de spontanéité. A vouloir (trop) défendre son statut de « casse-couilles » en chef qui veut « rendre visible les invisibles » tout en gardant la tête haute, notamment par l’intermédiaire des réseaux sociaux (nouvelle source de pitch cinématographiques depuis quelques temps !), elle donne l’impression de réciter son texte, oubliant d’être complètement naturelle et totalement convaincante devant l’objectif.
La faute également autant à la réalisatrice débutante Léa Frédeval, auteur du roman du même nom dont est adapté ce film, qu’aux nombreux clichés employés voire lourdement soulignés et même fortement appuyés – à la fois chez elle et dans le reste du casting où il n’y en a pas un(e) pour rattraper l’autre question orientation ! -, le tout dans un défilé assez caricatural et sans pertinence de colocataires en quête de petits boulots alimentaires (le journaliste free-lance et beau gosse de service, l’emmerdeuse qui gueule pour un rien surtout auprès de son copain créateur de jeux vidéo, le pas encore DJ frimeur, dragueur et livreur de pizzas, la lesbienne de surcroît « noire » qui vend des dessous féminins, et le banquier sans grande ambition et tout sourire dehors).
Signe des temps (mais sans argent : « bienvenue chez les pauvres ! » donc), ce long métrage prévisible et peu convaincant ne vaut que par quelques banalités d’usage (« sans mec, ni appart et encore moins de futur », bref, en totale absence de repères, que faire ?) et autres rares messages lancés par ces employeurs à la recherche d’une main-d’œuvre bon marché – pour ne pas dire pas chère du tout et qui rame à tous les coups ! - et en quête d’exploitation d’une génération égocentrique de « moins que rien » qui a bien du mal à se projeter vue leur impatience bornée - passant son temps à se plaindre et à pleurnicher -, et dont ils profitent abusivement tout en « renvoyant leur jeunesse à la gueule » sans autre forme de procès...

C.LB



 
 
 
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