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La voix de Hind Rajab
Sortie
le 26/11/2025
De Amer Hiehel, Clara Khoury, Motaz Malhees et Saja Kilani avec Amer Hiehel, Clara Khoury, Motaz Malhees et Saja Kilani
29 janvier 2024. Les bénévoles du Croissant-Rouge reçoivent un appel d'urgence. Une fillette de six ans est piégée dans une voiture sous les tirs à Gaza et implore qu'on vienne la secourir. Tout en essayant de la garder en ligne, ils font tout leur possible pour lui envoyer une ambulance. Elle s'appelait Hind Rajab.
La dernière phrase du synopsis ci-dessus ne laisse rien présager de bon quant à son dénouement : pas de happy end à l’américaine cette fois, d’autant plus qu’ici, on est en Cisjordanie, à quelques dizaines de kilomètres de la bande de Gaza et donc, du conflit israélo-palestinien. Et ce que nous allons vivre pendant 1h30, c’est une histoire vraie, basée sur des faits réels (avec à l’appui, les véritables échanges sonores enregistrés à l’époque), celle de la petite Hind Rajab, bloquée mais cachée dans une voiture criblée de balles dans laquelle une bonne partie de sa famille a été décimée, suspendue à un téléphone portable dans l’espoir qu’on vienne la délivrer rapidement et, finalement, tuée lors de l’occupation de son quartier par l’armée israélienne. Il n’y a aucun parti pris à prendre ou à avoir pour l’un ou l’autre des 2 peuples en plein affrontement : c’est malheureusement la guerre avec inévitablement ses tueries, ses morts et ses horreurs. Hind a fait partie de ces « dommages collatéraux » qui jonchent le sol palestinien depuis un peu plus de 2 ans maintenant, et ce film est l’un des meilleurs moyens de se rendre compte, du moins, d’avoir quelques notions de ce qui se passe sur place en pareille situation. Là, nous sommes à l’intérieur d’un centre d’appel du « Croissant-Rouge » - la version palestinienne de notre service d’urgence de la Croix-Rouge – où plusieurs personnes, des bénévoles particulièrement sur les nerfs, essayent de venir en aide à toutes celles et tous ceux en détresse qui en ont besoin. Ca s’énerve, ça s’engueule, ça crie et ça pleure devant l’ampleur du drame qui se joue devant nos yeux. La tension – et le stress – est palpable, surtout lorsque la décision d’aller chercher Hind prend des allures de parcours du combattant : il faut passer par tout un tas de coordinations et ces procédures sont aussi longues que compliquées car il faut demander l’accord à plusieurs intermédiaires afin de sécuriser l’itinéraire qui amènera les secouristes et l’ambulance sur les lieux où se trouve la fillette de 6 ans apeurée. On assiste à une sorte de huis clos étouffant et frustrant plus ou moins théâtral (tout le film se déroule dans quelques pièces au sein de l’organisme du Croissant-Rouge), et d’une grande fébrilité, où chaque seconde compte et où chacun.e, impuissant.e devant le drame, essaye tant bien que mal de rester en contact avec la (future) « victime » jusqu’à l’intervention possible des secours venus tenter de la sauver. Entre discussions parfois houleuses voire souvent inutiles, et paroles le plus clair du temps réconfortantes, le désarroi se lit sur le visage de ces acteurs et actrices – tous palestiniens - dont certain.e.s ressemblent aux vrais protagonistes de cette triste destinée (notamment à travers des images filmées au téléphone portable). Ce film témoignage puissant, sorte de cinéma-vérité, de Kaouther Ben Hani (La belle et la meute ; L’homme qui a vendu sa peau ; Les filles d’Olfa) , proche d’un documentaire, ne peut que forcément susciter l’empathie et la prise de conscience (de part la présence sonore d’Hind que l’on ne verra pas à l’écran), même si le pathos vient s’installer ici et là à plusieurs reprises (et pour cause !). Ce n’est d’ailleurs pas pour rien s’il a remporté le Lion d’Argent lors de la dernière édition de la Mostra de Venise, et qu’il représentera la Tunisie aux prochains Oscars de 2026.
C.LB
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