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La folle journée ou le mariage de Figaro (jusqu’au 4 janvier 2026)
le 06/09/2025
au
théâtre La Scala Paris (du mercredi au samedi à 21h et dimanche à 17h30
Mise en scène de Léna Bréban avec Philippe Torreton, Marie Vialle, Éric Bougnon, Gretel Delattre, Salomé Dienis Meulien, Annie Mercier, Jean-Jacques Moreau, Grégoire Œstermann, Antoine Prud’homme de La Boussinière, et Jean Yves Roan écrit par Pierre Augustin Caron De Beaumarchais
Et si pour parler du présent, on cherchait dans le passé ? Voici qu’à la Scala de Paris, une nouvelle mise en scène va puiser dans le théâtre du XVIIIème siècle pour nous parler d’aujourd’hui. C’est cette fois-ci à Beaumarchais que la metteuse en scène Léna Bréban fait appel pour évoquer les thématiques de liberté et de consentement, chères à notre époque. C’est en 1778 que Beaumarchais publie « le mariage de Figaro », et le moins que l’on puisse dire est que l’époque n’est pas spécialement marquée par le féminisme. Le récit de l’auteur en témoigne : Figaro, le domestique, veut se marier avec Suzanne, la camériste mais c’est sans compter sur l’envie du comte Almaviva, lassé de la comtesse, de se rabattre sur Suzanne, et d’exercer ainsi un « droit de cuissage » qu’il vient pourtant d’abolir. Marceline, quant à elle, voudrait épouser Figaro qui lui a promis de le faire s’il ne s’acquitte pas de la dette qu’il a contracté avec elle. C’est là l’essentiel de cette intrigue touffue où dominent (déjà) les grands thèmes de domination sociale, de domination des hommes sur les femmes, et bien sûr la question du consentement. Le comte prend ainsi pour possession sa domestique et Marceline peut compter sur le mariage avec Figaro si sa dette n’était pas remboursée. La langue est châtiée et l’intrigue est conservée à l’identique de ce que l’auteur avait écrit. Tout au plus quelques chansons contemporaines, tel un tube de Cabrel ont été ajoutées. Pas de costumes empesés pour refléter l’époque, des comédiens qui connaissent leur métier et un Torréton, certes beaucoup plus âgé que le rôle mais engagé à souhait dans l’action. Car de l’action, il y en a dans cette intrigue à tiroirs qui faisait grincer des dents l’élite de l’époque. On se cache, on se masque, on saute par les fenêtres, on profite de l’obscurité pour être quelqu’un d’autre. Tout finit par rentrer dans l’ordre, mais entretemps, l’ordre établi aura vacillé et l’auteur se sera exprimé sous les traits de son principal personnage en parlant de la liberté du créateur. On applaudit le choix de la metteuse en scène qui a choisi de « vieillir » la distribution, Hormis Torréton qui n’a pas l’âge du rôle, citons notamment Annie Mercier (Marceline), sa voix rocailleuse et son physique impressionnant qui vient ajouter de l’étrange à cette mise en scène un peu décalée. Mais force est de reconnaitre que l’on sort un peu ennuyé et peu convaincu de ce spectacle qui, finalement, ne propose rien de très enthousiasmant. On est d’autant plus désolé que le travail des comédiens est irréprochable et que chacun tient sa place et son rang au cordeau. Gageons cependant que cette « folle journée ou le mariage de Figaro » saura séduire les amoureux de la langue du XVIIème siècle, une langue aussi châtiée que politique. Rappelons que la pièce fut un triomphe dés sa création, et ce malgré l’opposition du roi. Un gage de qualité !!
Eric Dotter
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