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Crasse
Sortie
le 11/06/2025
De Luna Carmoon avec Saura Lightfoot-Leon, Hayley Squires, Joseph Quinn, Nabil Elouahabi, Cathy Tyson, Samantha Spiro et Sam John (III)
Londres, 1984 : Maria, âgée de 7 ans, et sa mère vivent dans un monde bien à elles, tendre et singulier, tissé d’amour et de trésors amassés. Mais une nuit, tout bascule. Dix ans plus tard, Maria vit une vie paisible dans sa famille d’accueil quand un jeune homme plus âgé, Michael, fait irruption dans leur foyer, ravivant des blessures enfouies et brouillant la frontière entre magie et folie…
La « crasse » - hoard en version originale anglaise et titre du film sorti de l’autre côté de La Manche en 2023 ( !!) - comme unique mot d’ordre de cette production audacieuse qui flirte avec la folie ambiante et le nauséabond persistant mais sans l’odeur en prime, fort heureusement. Entre faire les poubelles, manger des restes récupérés ici et là, et vivre dans un taudis ou plutôt dans un capharnaüm indescriptible, peuplé d’immondices de toutes sortes, le film aurait presque pu être visionné en « odorama » ! Quoi qu’il en soit, la première partie de l’existence de notre jeune héroïne dans cette espèce de squat par sa mère célibataire un brin timbré sur les bords, va la façonner à tout jamais pour le restant de sa vie. L’absence de vrais repères - et aussi sûrement d’un père - va la marquer au point de réitérer les mêmes (mauvaises) habitudes et (folles) dérives quelques années plus tard, lorsqu’elle aura grandit. On navigue pendant plus de 2 heures dans son univers bizarre et défaillant bien à elle, comme si on était installé dans sa tête, vivant cette existence décousue et plutôt zarbi à ses côtés avec la nette sensation qu’une réaction imprévisible de sa part ou qu’une tragédie sous-jacente peut surgir à n’importe quel moment. Quelle performance impressionnante et hautement réussie pour l’actrice Saura Lightfoot-Leon dont c’est ici le premier long métrage ! Omniprésente à l’écran, elle s’est totalement investie dans son rôle, au point de se l’être appropriée pour en faire son propre « terrain de jeu » (d’adulte ?) en quelque sorte. Jeu qu’elle maîtrise à la perfection, où elle donne l’impression de l’avoir créé de toute pièce pour les besoins du film. On doit ce drame psychologique hyper sensible, une « surprise » cinématographique aussi dérangeante que fascinante, à la réalisatrice et scénariste britannique Luna Carmoon qui nous livre ici un 1er film pour le moins singulier, où il question d’une enfance brisée par une rupture brutale dans son passé, d’une jeune fille hantée par des souvenirs et surtout des traumatismes remontant avant son adolescente, de « trucs de gonzesses » à la limite de la débilité ou de l’hystérie, et de sentiments « adultes » exacerbés parfois à son paroxysme. Sans être forcément « shocking » ou, si vous préférez, inconvenant, Crasse marque autant par son longueur (et sa lenteur narrative aussi) que par son approche originale (avec une BO branchée eighties), véritable choc émotionnel et fracture assurée dans le cinéma anglais actuel pas toujours très innovant.
C.LB
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